Funky Front Covers - Part XIV

Une décennie a passé, le préposé a cédé les clefs du RHCS cette année à sa collègue Miss Magenta, mais le rendez-vous annuel de la fin du mois de décembre, les Funky front covers ©, reste immuable, le meilleur du pire des pochettes les plus insolites, sexuées ou sexistes des musiques funk, disco et consorts des années 70 et 80 est toujours au rendez-vous. En vous souhaitant à toustes nos meilleurs vœux, chantons tous l'avènement de cette quatorzième saison. 

En guise de mise en bouche, et débuter ainsi en douceur cette nouvelle saison, offrons nous le meilleur du déguisement offert par la gent masculine :

  

Petite fille - Sébastien Lifshitz (2020)

Après avoir mis en scène Les invisibles (2012), César du meilleur documentaire en 2013, Bambi (2013), Teddy Award du meilleur documentaire au festival de Berlin, et Les Vies de Thérèse (2016), sélectionné à La Quinzaine des Réalisateurs et lauréat de la Queer Palm, Sébastien Lifshitz consacrait de nouveau un documentaire à la communauté LGBTQI+ avec le dénommé Petite fille. Présenté et remarqué à la Berlinale de cette année, le long métrage suit la vie au quotidien d'une petite fille transgenre de sept ans nommée Sasha. Soutenue par sa famille, parents, frères et sœur, Sasha sera suivie durant une année par la caméra bienveillante de Sébastien Lifshitz, au cours de laquelle sa famille devra se battre afin de faire accepter la différence de cette petite fille fantastique. 

Enfin. Enfin, en 2020, un documentaire aborde le thème rare, sinon inédit, de la transidentité chez l'enfant, et qui devrait, espérons le, bousculer les certitudes et combattre l'ignorance d'un certain grand public. Bouleversant, Petite fille l'est, peut-il en être autrement ? Le regard de Sacha vaut tous les argumentaires. Sasha est une petite fille. Point. A toutes les personnes, enfants ou adultes, qui oseraient mettre en doute cette évidence, Sasha a cette réponse désarmante : "je suis une fille". 

Identités trans, au-delà de l'image - Sam Feder (2020)

Auteur d'un premier documentaire Boy I Am (2006) qui faisait le portait de trois jeunes hommes transgenres à New-York, Sam Feder signait cette année, présenté en avant-première au festival de Sundance, un nouveau documentaire, Identités trans, au-delà de l'image, dont le sujet était la représentation des transgenres par Hollywood et les médias étasuniens, et leurs impacts sur la vie des transgenres et sur la culture américaine. Vaste sujet tant ladite représentation est apparue aux origines du cinéma muet, quand le sinistre blackface côtoyait le travestissement. Véritable étude exhaustive où la parole donnée est volontairement et exclusivement offerte aux premier.e.s concerné.e.s, FTM et MTF [1]Disclosure: Trans Lives on Screen s'attache à décortiquer comment cette représentation, faussée, faut-il s'en étonner, a porté préjudice aux transgenres, tant dans la manière dont iels se percevaient et dans celle où le public les percevait. 

"Chaque personne trans porte en elle l'histoire de la représentation trans à travers ce qu'elle a vu" 
Jen Richards (actrice, autrice)

Une femme fantastique - Sebastián Lelio (2017)

Lauréat de nombreux prix dont l'Ours d'argent du meilleur scénario et l'Oscar du meilleur film en langue étrangère, Una mujer fantástica du chilien Sebastián Lelio aura marqué les esprits au cours de l'année 2017, et propulsé son interprète principale Daniela Vega, alors inconnue, au rang de star au Chili. Mieux, lauréat au cours de cette même Berlinale du prix Teddy du meilleur film, ce cinquième long métrage peut s'enorgueillir d'être l'un des rares films à avoir aussi bien traité la question de la transidentité. Dont acte.  

Marina (Daniela Vega), une jeune serveuse transgenre qui aspire à devenir chanteuse, développe une relation amoureuse avec Orlando (Francisco Reyes), le propriétaire d'une imprimerie de vingt ans plus âgé qu'elle. Tous deux planifient leur avenir ensemble, mais Orlando meurt soudainement. Marina se voit contrainte d'affronter les réactions haineuses de la famille d'Orlando afin de prouver qu'elle est une femme honnête et digne.

Crash - David Cronenberg (1996)

Dix septième volume des attendus coffrets ultra collector édités par Carlotta, celui-ci consacré au film culte de David Cronenberg, Crash, adapté du roman éponyme de J.G. Ballard (1973), qui défraya la chronique Cannoise au mitan des années 90, ne pouvait que remporter les suffrages des cinéphiles exigeant.e.s. Prix Spécial du Jury pour « son audace, son sens du défi et son originalité », contre l'avis même du président dudit jury, Francis Ford Coppola, les polémiques stériles apparues, il y a déjà un quart de siècle, ont laissé la place à une réévaluation quasi unanime, tant ce douzième long métrage de David Cronenberg peut être considéré légitimement comme l'un des sommets artistiques du réalisateur canadien. Vénéneux, clinique, obsessionnel, déviant, malaisant, les qualificatifs ne manquent pas pour décrire ce film d'horreur d'un autre genre désormais disponible dans sa version restaurée 4K depuis le 21 octobre en Coffret Ultra Collector Blu-ray + DVD + livre et éditions Blu-ray et DVD. 

James (James Spader) et Catherine Ballard (Deborah  Kara Unger) mènent une vie sexuelle très débridée. Suite à une grave collision avec le docteur Helen Remington (Holly Hunter) ayant entraîné la mort de son mari, James se lance dans l'exploration des rapports étranges qui lient danger, sexe et mort. Grâce à leur rencontre avec Vaughan (Elias Koteas), un étrange photographe fasciné par les accidents de la route, le couple Ballard va finir par trouver un chemin nouveau mais tortueux pour exprimer leur amour…
 

Et mourir... de plaisir - Joe d'Amato (1978)

L'histoire a été mainte fois répétée en ces lieux. La courte mais prolifique période caribéenne du réalisateur bis Joe d'Amato marqua durablement l'inconscient du cinéma d'exploitation. Sesso nero, Hard Sensation, Exotic Love, Porno Holocaust, La nuit fantastique des morts-vivants, Orgasmo nero, etc., chacun de ces longs métrages a démontré, à des degrés divers, combien le cadre idyllique de Saint-Domingue offrait à Aristide Massaccesi, de son vrai nom, l'acmé de son art déviant.

Premier film officiel de la série de dizaine de productions tournées en République Dominicaine, Papaya dei Caraibi poursuivait ainsi la démarche entreprise par Joe D'Amato depuis Voluptueuse Laura, en cultivant son attirance pour le genre mondo. Egalement première incursion du réalisateur dans le culte vaudou, religion dont les rites imprégneront durablement les prochains films, le Romain trouvait finalement en cette île paradisiaque, les éléments déterminants pour parfaire sa réputation de spécialiste du cinéma exotique bis italien, qui le feront passer, deux ans plus tard, de l'érotisme soft à la pornographie avec Sesso Nero, premier film hard italien [1] avec Mark Shannon, Annj Goren et Lucia Ramirez.

De cette boîte de Pandore caribéenne éveillant faussement les fantasmes du mâle occidental venu se repaître de clichés, supposés émoustillants, Et mourir... de plaisir, dans sa version française, s'inscrit, on l'aura compris, enfin dans la continuité du cycle Black Emanuelle [2] qui permit à Joe D'Amato de parfaire à la fois sa popularité auprès d'un cercle d'initié.e.s déviant.e.s, et auprès d'une censure goûtant peu à ses excès formels. Mais n'allons pas trop vite.
 

Antiporno (Anchiporuno) - Sono Sion (2016)

Présenté en avant-première le 7 septembre 2016 lors de L'Étrange festival, l'habitué des lieux, le japonais Sono Sion, fit de nouveau sensation avec Antiporno. Commande nostalgique initiée par la Nikkatsu, déjà productrice des notables Cold Fish et Guilty of Romance, ce film, au même titre que les quatre autres commandes mises en scène par des réalisateurs de renom (divers) de l'archipel (Hideo 'The Ring' Nakata, Akihiko 'Harmful Insect' Shiota, Isao 'A Day on the Planet' Yukisada et Kazuya 'The Devil’s Path' Shiraishi), n'avait d'autre ambition que de faire revivre, par cet hommage, les grandes heures du cinéma d'exploitation nippon, et de fêter le quarante-cinquième anniversaire du premier Roman Porno de la Nikkatsu. Productrice au début de la décennie 70's de films érotiques dérivés du pinku eiga, ces films exploités à petits budgets [1] jusqu'à la fin de la décennie suivante se démarquaient autant par leurs thèmes, la sexualité des classes populaires (la série Apartment Wife) ou le sadomasochisme [2], que la relative liberté dont jouissaient les réalisateurs au cours de ces années 70. Finalement convaincu de participer à ce tribute, malgré ses nombreuses réticences au départ, Antiporno s'avère, non content d'être une réussite, une entreprise de sabordage de la part du frondeur Sono Sion, déboulonnant un projet supposé seulement sexy, au grand dam des dirigeants du studio. Film empreint du contexte social et politique du Japon de 2016, le long métrage n'aura jamais aussi bien porté son nom, antithèse du film pornographique, son auteur y dynamite, sinon pervertit, le genre pour mieux pointer du doigt, dixit son héroïne, "une société de merde et sa liberté de merde, ses hommes de merde qui dominent tout". Mais n'allons pas trop vite...

Artiste indépendante renommée, Kyôko (Ami Tomite) est une écrivaine et peintre piégée par son propre succès. Hantée par le souvenir de sa défunte sœur Taeko, celle qui se définit comme une "pute, mais vierge", passe le plus claire de son temps enfermée dans son studio. Un matin, son assistante Noriko (Mariko Tsutsui), plus âgée qu'elle, vient lui présenter le programme de la journée, dont une interview par un célèbre magazine. Soumise aux humiliations et jeux pervers de Kyôko plongée en pleine névrose, les deux femmes sont soudainement interrompues par la voix d'un cinéaste criant "Coupez !". 
   

L'éventreur de Notre-Dame - Jess Franco (1974)

Produit par Eurociné, Lesoeur père et fils, L'éventreur de Notre-Dame se situe dans la longue liste des longs métrages réalisés par Jess Franco qui connurent autant de versions remontées, censurées, agrémentées de scènes pornographiques, que de titres différents. De l'explicite Sexorcisme, ledit film eut ainsi droit également comme titre à l'évocateur Expériences sexuelles au château des jouisseuses, et autre méphistophélique Exorcisme et messes noires. Dans la grande tradition des relectures franciennes, L'éventreur de Notre-Dame devint quelques années plus tard en 1979, sous la houlette du même Franco, à partir du matériau originel et avec de nouvelles séquences en sus, un autre long métrage prénommé cette fois-ci Le Sadique de Notre-Dame [1]. Enfin, grand admirateur de l'œuvre Sadienne, qui trouva un premier écho une dizaine d'année plus tôt avec le séminal Le sadique Baron Von Klaus (1962), Jess Franco marquait ainsi, au besoin, encore les esprits déviants au mitan de la décennie suivante, par sa capacité à filmer frénétiquement crimes sadiques et autres tortures théâtralisées pour le plus grand plaisir d'un public converti à sa cause depuis l'originel Horrible Docteur Orlof.

Paris, Mathis Vogel (Jess Franco), prêtre défroqué, écrit pour subvenir à ses besoins des récits sadomasochistes pour un magazine fétichiste publié par Pierre de Franval (Pierre Taylou). Doué pour décrire avec véracité les scènes de tortures inspirées par les exorcismes datant de l'Inquisition, Vogel cache en vérité un fanatique religieux qui kidnappe, torture et assassine des jeunes femmes afin de, selon son esprit dérangé, sauver leurs âmes en perdition. Peu de temps après, il découvre l'existence de messes noires organisées dans des sous-sols parisiens, et à laquelle participe l'assistante de Franval, Anne (Lina Romay). Persuadé que ces rites sataniques factices sont bien réels, Vogel se lance dans une nouvelle quête purificatrice...

Orgasmo nero - Joe D'Amato (1980)

Énième rappel des faits. A la fin de la décennie 70, Aristide Massaccesi, dit Joe D'Amato, accompagné de ses fidèles complices, en premier lieu le géant génois Luigi Montefiori, dit George Eastman, embarquait pour Saint-Domingue en République Dominicaine. Durant cette escale caribéenne, le réalisateur romain mit en scène plusieurs longs métrages qui marquèrent durablement le cinéma d'exploitation italien : Sesso neroHard Sensation, Exotic Love, Porno Holocaust, La nuit fantastique des morts-vivants et enfin, celui qui nous intéresse Orgasmo nero. Loin de l'image habituelle que l'on veut bien donner au cinéma Bis, et au premier intéressé, Joe D'Amato se démarquait de ses compères tant sur la forme que sur le fond. Adepte de la méthode forte, le réalisateur de Voluptueuse Laura savait mieux que quiconque que la provocation est la meilleure des publicités pour un film produit dans ce type de circuit, quitte à franchir les limites du bon goût et de la bienséance, au risque de devenir persona non grata auprès des censeurs du monde entier. Orgasmo Nero conforte ainsi, une fois encore, comme cité plus haut, la place unique de Joe D'Amato dans le paysage d'un cinéma d'exploitation européen qui connaissait ses dernières heures de gloire. Mieux, Orgasmo Nero constitue la preuve qu'Aristide Massaccesi, à son corps défendant [1], est un auteur, ce nouveau film constituant une nouvelle pierre dans l'édifice misandre de sa filmographie depuis le séminal Emmanuelle et Françoise (1975).

Anthropologue, Paul (Richard Harrison) étudie les coutumes d'une tribu qui peuplent une île des Caraïbes. Rejoint par son épouse, Helen (Nieves Navarro), Paul vit mal à l'incapacité du couple à pouvoir avoir un enfant. Sur l'île, Helen se rapproche de la jeune autochtone Haini (Lucia Ramirez), leur amitié naissante cédant la place rapidement à une idylle entre les deux femmes. Occupé par ses recherches, Paul, qui ignore tout de la relation saphique de son épouse, propose à Helen d'inviter Haini dans leur résidence à Saint-Domingue...