Les cinq morceaux qui tournent en ce moment IV


Avon - Queens of the Stone Age [1998]

L'histoire est suffisamment connue pour ne pas être trop développée en ces lieux... 1996, création du groupe Gamma Ray par Josh Homme et sortie du single If Only. 1997, après un changement de patronyme, Kai Hansen appréciant modérément qu'un cuistre américain choisisse le même nom que sa grotesque formation, les Queens of the Stone Age et Kyuss publient un EP qui fera date dans le petit monde fermée du stoner, l'ancien et nouveau groupe de Josh Homme occupant chacun une face du split intitulé sobrement Kyuss/Queens of the Stone Age (1). L'année suivante, le premier album des QOTSA sort et le potentiel que laissait envisager le EP précédent donne la pleine mesure du talent de compositeur du grand rouquin.

Alice ou la dernière fugue - Claude Chabrol (1977)

Pour reprendre un adjectif déjà usité naguère [1], réitérons nos choix lexicaux et affirmons sans la moindre animosité qu'on aura du mal à nous faire avaler que la filmographie de Claude Chabrol n'a pas connu certains ratés et autres ventres mous durant la décennie 70, de l'aveu même du cinéaste au passage, laissant conjecturer au préposé la présence de plusieurs films par conséquent anecdotiques [2]. Si Alice ou la dernière fugue n'est pas à proprement un long-métrage appartenant à la catégorie susnommée, l'oubli qu'il suscite de nos jours, ajouté au culte émoussé autour de la belle batave (et non pas suédoise s'il vous plait) Sylvia Kristel avant sa triste disparition, aurait tendance à l'y ranger. Erreur s'il en est puisque ce film de 1977 est un des rares essais concluant du cinéma français dans le genre fantastique [3].

How I Got Over - The Roots (2010)

How I Got Over ou la nouvelle offrande des années paires [1] de la formation en provenance de Philadelphie, The Roots. Après un Rising Down légèrement en demie-teinte, Black Thought et ?uestlove remettent le couvert. Rising Down avait laissé un sentiment mitigé, un album en quelque sorte "mineur", son prédécesseur Game Theory lui faisant bien trop d'ombre, en dépit de ses atmosphères paranoïaques et denses avec cette constante, cette capacité à écrire des chansons mélancoliques ne laissant jamais la place au pathos à l'instar d'un Radiohead [2]. Criminal issu de ce désormais avant-dernier disque pourrait dès lors servir de lien ou de transition idéale, How I Got Over ou un savant équilibre entre l'engagement et la tristesse.

Comme à leur habitude, les deux têtes pensantes ont fait appel à nombre de featuring, des habitués de plus ou moins longue date (Dice Raw, Peedi Peedi, Porn), quelques nouveaux venus pouvant laisser craindre un affadissement voire un ratage du fait de leur provenance musicale (Monsters of Folk, Joanna Newson) et d'autres (supposés) plus proches de leurs aspirations (Blu, John Legend, Phonte Coleman). Dans le deuxième cas de figure, voir effectivement se côtoyer deux groupes ou artistes catalogués Indie Folk attisait autant la curiosité que le doute... s'il ne s'agissait pas des Roots. Et on dénote même, sinon une prise de risque tout du moins, une ambition réelle de la part du combo de Philly. Quand bien même l'Indie Folk aurait le vent en poupe ces derniers temps, la facilité aurait été de faire appel à des personnalités plus à même de toucher un large public, les passerelles entre la pop et le hip-hop ayant déjà fait ses preuves depuis de nombreuses années [3].
 

TunnelVision Brilliance - Scott Reeder (2006)

L'homme de prime abord est des plus sympathiques, et le fait d'être l'ancien bassiste de Kyuss ne joue, bien au contraire, pas en sa défaveur. Or contrairement à ces anciens camarades de jeu (le guitariste Josh Homme au sein des désormais célèbres Queens of the Stone Age, le chanteur John Garcia voire même le batteur Brant Bjork), Scott Reeder aura confirmé indirectement l'adage populaire qui veut que le bassiste de rock est par définition un homme effacé. Dès lors, avant de publier un album solo ou de créer son propre groupe après l'arrêt de la formation culte de Palm Desert, l'ancien remplaçant de Nick Oliveri allait-il multiplier les diverses apparitions louant ses services et son groove stoner ? La demande étant des plus faibles [1], Reeder se fit plutôt la main en produisant quelques albums appartenant ou non à cette sainte chapelle [2], en attendant la suite.

Après avoir composé dans son coin durant presque deux décennies son propre répertoire, Reeder sortit finalement en 2006 son premier et unique album solo intitulé TunnelVision Brilliance. A juste titre, au vu de la carte de visite du bassiste, l'amateur de rock pouvait s'attendre à un énième disque de stoner, classique, certes, mais sans surprise, Reeder invitant ici ou là quelques connaissances et amis comme souvent en pareil cas. C'était bien vite omettre la nature effacée (?) de notre homme, Reeder enregistrant l'archétype même de l'album solo, ce dernier s'occupant aussi bien seul, de la production, de la composition et de l'interprétation.

Abbey Lincoln (1930-2010)

Triste nouvelle, une de plus pourrait-on ajouter pour les amateurs de jazz, si ces derniers n'étaient pas habitués à cette fatalité, l'une des dernières grandes voix, sinon la dernière grande voix noire du 20ème siècle vient de s'éteindre à 80 printemps passée, le 14 août dernier. Abbey Lincoln n'est plus.

Connue pour son engagement pour les droits civiques dans les années 60 aux côtés de son mari et mentor, le batteur de jazz Max Roach, participant aux premières manifestations contre la ségrégation, Abbey enregistra aussi plusieurs disques engagés tel son album solo Straight Ahead (1961) ou sur l'historique We Insist! Max Roach's Freedom Now Suite de Roach sorti l'année précédente. Blacklistée très rapidement par les labels américains désirant la cantonner dans un rôle de belle chanteuse aseptisée du fait de sa plastique avantageuse, il a fallu attendre la deuxième moitié des années 80 pour revoir celle qui fut, à juste titre, considérée comme la digne héritière de Billie "Lady Day" Holiday [1].
  
En guise d'humble hommage et en dépit des propos de la dame, celle-ci considérant son disque de 1961 comme son premier véritable disque, je reprendrai une ancienne chronique consacrée à son album précédent, Abbey is Blue, celui qui m'a fait découvrir cette grande dame.

Splice - Vincenzo Natali (2010)

En préambule, même si l'envie démange le préposé à la chronique, on se gardera bien d'avoir (au début) un esprit un peu trop acerbe envers le réalisateur canadien Vincenzo Natali, encore que depuis son culte Cube, les espoirs portés en lui se seraient dissipés au cours du temps si on en croit ses deux précédents et anecdotiques longs métrages (dont l'ampoulé Cypher). Splice ou une histoire de génétique qui n'est pas sans rappeler certains thèmes déjà évoqués maintes fois par un autre compatriote autrement plus talentueux, mais n'allons pas trop vite...

Clive Nicoli (Adrien Brody) et Elsa Kast (Sarah Polley), deux chercheurs en génétique ont réussi l'improbable, créer un être organique artificiel en combinant l'ADN de différentes espèces. Cet hybride d'aspect larvaire, loin de l'image attendue d'une chimère, leur permet d'obtenir de nouvelles molécules, l'industrie pharmaceutique subventionnant leurs recherches d'apprenti-sorcier étant plus intéressée par la manne financière induite par ces protéines nouvellement créées que par la perspective, ô combien réjouissante, de créer des vers de dix kilos prénommés pour l'occasion Ginger et Fred  [1].
  

Le portrait de Doriana Gray (Die Marquise von Sade) - Jess Franco (1975)

C'est en 1975 que le duo Jesús Franco/Lina Romay, soit le génial cinéaste déviant ibérique et sa muse, nous convient à suivre les aventures de Doriana Gray, qui comme son nom l'indique est une très libre adaptation du roman d'Oscar Wilde.

Jesús Franco, très productif à l'image de son compère transalpin Joe D'Amato qui durant cette année de pré-canicule hexagonale, et entre le tournage d'un film de prison pour femmes, un jovial Swedish Nympho Slaves et un vrai-faux Orloff (Jack l'éventreur avec Klaus Kinski), propose à ses amateurs éclairés une relecture de son précédent La comtesse noire (Les Avaleuses, etc.) sorti deux années plus tôt. Un long métrage faisant date dans le petit monde du bis, et sans conteste le premier grand rôle de Lina Romay en vampire femelle se nourrissant, non pas du sang, mais de la jouissance de ses victimes en aspirant leur énergie vitale. 
 
Doriana Gray ou les affres d'une demoiselle vampire nymphomane qui comme son lointain cousin britannique ne connait pas l'ouvrage du temps au profit d'une jeunesse éternelle. Relecture jusqu'au boutiste de La comtesse noire, Jesús Franco laisse de côté l'aspect horrifique et sanguinolent du film vampirique traditionnel [1] pour recentrer une histoire faisant la part belle au mystérieux et aux atmosphères évanescentes et oniriques.

Cronico Ristretto: L'au-delà - Lucio Fulci (1981)

L'au-delà (The Beyond, L'aldilà), long métrage du réalisateur transalpin Lucio Fulci, est connu des initiés comme le dernier chapitre de sa trilogie infernale débutée précédemment par Frayeurs une année plus tôt puis par La maison près du cimetière sorti la même année que le film qui nous intéresse, soit en 1981. Un film s'inscrivant dans l'âge d'or du cinéma d'exploitation italien d'épouvante (un de plus) dans le sillage des grands maîtres étasuniens tel un Romero (1), à la différence près que nos amis transalpins eurent toujours le bon goût d'apporter une touche spéciale à leur production horrifique (cheapos) à défaut d'avoir les budgets de leurs pairs américains, à savoir une propension à verser plus facilement dans la provocation, l'extrême, le grotesque ou le surréalisme comme cet Au-Delà de Fulci.

1927, dans un hôtel particulier en Louisiane. Le peintre Schweick (2) finalise son dernier tableau quand ce dernier est interrompu dans son travail par quelques autochtones virulents l'accusant de sorcellerie.

Live report : David Murray - Tempo Rives 2010

En attendant un retour prochain, je republie quelques photos déjà postées en partie sur le blog de mon Apolline du concert donné par David Murray et ses Gwo Ka Masters le jeudi 23 juillet dernier à l'occasion de la manifestation musicale Tempo Rives sur les bords de la Maine en face du château (du bon roi René).

Un concert gratuit débuté par la première partie Sweet Gum Tree, formation angevine menée par le dénommé Arno Sojo, ou un pop rock efficace dont le point fort fut le son de sa Gretsch (?) et ses quelques trop rares distorsions soniques.