Body Double - Brian De Palma (1984)

Dans le cadre de la rétrospective Brian De Palma menée par Carlotta depuis quelques années, par les ressorties successives de Pulsions, Blow Out, Obsession ou plus récemment Furie en copie restaurée, s'ouvre une nouvelle collection, intitulée coffret Ultra Collector dont le premier numéro est consacré au culte Body Double. Fraîchement accueilli à sa sortie par la critique et le public, le long métrage a gagné au fil des années ses galons de joyau DePalmien pour devenir un des films les plus adulés de ses admirateurs, mais n'allons pas trop vite... 

Acteur aux cachets aléatoires vivant à Los Angeles, Jack Scully (Craig Wasson) est victime de claustrophobie lors du tournage d'un film d'horreur dans lequel il joue un vampire. Renvoyé par le réalisateur (Dennis Franz), Jack rentre chez lui et surprend sa petite amie au lit avec un autre. A la rue, sans travail, il écume les castings de la ville quand il fait la connaissance de Sam Bouchard (Gregg Henry) lors d'un cours où le professeur de théâtre tente d'exorciser sa claustrophobie. Autour d'un verre, Jack confie à Sam ses déboires, tandis que celui-ci lui fait une proposition intéressante: garder la luxueuse demeure d'un ami durant son absence, car il a décroché un rôle dans la pièce Private Lives à Seattle. La seule contrepartie qui lui est demandée, est de s'occuper des quelques plantes vertes de la maison, et de profiter de la vue panoramique, et en particulier, des jeux érotiques de sa riche et charmante voisine Gloria Revelle (Deborah Shelton) auxquels elle se livre chaque soir. Mais le voyeurisme va se révéler une activité plus dangereuse qu'il n'y paraît quand Jack découvre qu'un mystérieux indien rode autour de la belle…
   

Live report - Om au Divan du monde, Paris, 22 novembre 2015

Heureuse coïncidence ou hasard des calendriers, se sont produit la même semaine et au même endroit, les deux formations nées des cendres du groupe culte Sleep : Om et High On Fire (1), soit respectivement la section rythmique et le guitariste chanteur des auteurs du monstrueux Dopesmoker. Mené désormais par le bassiste Al Cisneros, le batteur originel Chris Hakius s'étant retiré des affaires musicales, Om faisait escale à Paris dans le cadre d'une mini tournée européenne (débutée le 14 novembre en République Tchèque), soit trois ans et demi après leur dernière venue à La Maroquinerie en avril 2012, trois mois avant la sortie de leur dernier album, Advaitic Songs.

En guise de préambule, avant les mantras soniques d'Om, les belges de The Black Heart Rebellion, en provenance de Gant, avaient pour tâche de faire patienter un public venu en masse (concert complet) pour Cisneros and co. Venu présenter leur nouvel album, People, when you see the smoke, do not think it is fields they're burning sorti le 29 octobre dernier, la musique de TBHR s'inscrivait idéalement dans le sillage de leurs « grands frères » étasuniens par leur goût prononcé d'insuffler à leur post-rock des influences world depuis leur précédent disque de 2012, Har Nevo. Riche sans être pompier, la prestation augurait du meilleur, leurs derniers disques évoquant par moment les ambitions des derniers Master musicians of bukkake en plus rock. Las. Si les disques et le mixage arrivaient à cacher les faiblesses du chanteur, sa voix dans les conditions du live plomba durablement la prestation du groupe. Sans épaisseur ou relief, doté d'un charisme anonyme, avouons que leur musique pour éviter ce goût d'inachevé aurait mieux fait de rester au stade instrumental. Dommage.
   

Garçon d'honneur | Salé sucré - Ang Lee (1993-1994)

Avant d'entamer une carrière hollywoodienne couronnée de succès et commencée en 1995 par le très remarqué Raison et sentiments, ou l'adaptation d'un des classiques de l'auteure britannique Jane Austen, le réalisateur taïwanais Ang Lee débuta en 1992 par Pushing Hands, premier volet de sa trilogie sur la famille intitulée « Father Knows Best ». Ce cycle connait aujourd'hui une nouvelle actualité par la sortie le 25 novembre prochain, par les bons soins de Carlotta, du deuxième et troisième chapitre de cette trilogie, Garçon d'honneur et Salé sucré, en support Blu-ray et DVD collector.

Œuvres d'un réalisateur tardif [1], ces deux longs métrages n'ont rien de juvéniles. Mieux, dépassant le simple cadre de la comédie, elles permirent à Ang Lee de faire résonner sur grand écran les mutations de la société taïwanaise. Fil conducteur de ces évolutions sociétales, l'acteur Lung Sihung fut l'interprète pour ces trois films de la figure paternelle, témoin involontaire des évolutions des relations entre les parents, garants de la culture traditionnelle, et les jeunes générations. Premiers films de la durable collaboration entre Ang Lee et le scénariste James Schamus [2] (Ice Storm, Tigre et Dragon, Lust, Caution), Garçon d'honneur et Salé sucré révélèrent au public international un réalisateur prometteur, dont le talent à croquer avec finesse le portrait de ses personnages fut auréolé au festival de Berlin en 1993 par l'Ours d'or.

Comédie de mœurs abordant le thème de l'homosexualité, Garçon d'honneur retrace l'histoire de Wei-Tong (Winston Chao), taïwanais naturalisé américain, vivant à New York avec son compagnon Simon (Mitchell Lichtenstein). Suite aux multiples pressions de ses parents, le jeune homme, sur l'idée de Simon, décide d'épouser Wei-Wei (May Chin), sa locataire chinoise à la recherche d'une carte verte. Les choses se compliquent quand les parents de Wei-Tong débarquent à New-York...

Live report : The Jon Spencer Blues Explosion - La Gaîté lyrique, Paris, 04 novembre 2015

Réapparu après un long hiatus au début des années 2010, d'abord par la sortie discrète du EP Black Betty enregistré conjointement avec Buzz Osborne et the Melvins, puis par celle de leur nouvel album Meat + Bone en 2012, huit années après leur précédent LP, le trio The Jon Spencer Blues Explosion signait cette année avec Freedom Tower: No Wave Dance Party 2015, un retour remarqué en mars dernier. Disque hommage à leur ville originelle New-York, l'album s'éloignait définitivement des orientations Stoniennes époque Plastic Fang (2002) pour revenir à l'énergie brute de leur début : un rock primal à l'urgence salvatrice. Mieux, jamais en studio les trois musiciens ne s'étaient tant rapprochés sur la forme de l'intensité qui caractérise leurs performances publiques. De quoi pousser aisément le préposé à la chronique à se déplacer à la Gaîté lyrique, et trouver par la même occasion la réponse à une des questions existentielles qui taraudent le rock critic aujourd'hui: est-il possible de pratiquer encore en 2015 du rock'n'roll en mocassins blancs ? Mais n'allons pas trop vite.