Tricky: Paranoia is the key

Dernier post avant une nouvelle expatriation. Et quoi de mieux que du Tricky pour sonder mon humeur du moment.

Après des débuts prometteur chez Massive Attack, Tricky Kid sort en 1995 son fameux Maxinquaye, disque phare de ce qu'on appellera trip-hop. Ce premier album en dépit d'être une des meilleurs créations de son auteur n'était finalement que le premier chapitre des peurs de Tricky. On ira jusqu'à dire que Maxinquaye est le disque le plus lumineux (enfin le moins sombre) de Tricky première période (le Tricky junkie en somme). Ses albums à venir étant en effet de plus en plus épais, rampants, malsains, sombres avec en point d'orgue l'étouffant Angels With Dirty Faces (si je vous dis que ce dernier est mon préféré, ça vous étonne?).

Ainsi un an après Maxinquaye, sort déjà son troisième LP Pre-Millennium Tension, album gentiment paranoïaque s'il en est, mais pas seulement. L'album fut enregistré en partie en Jamaïque au Grove Studios, du coup forcément, ce périple va influencer son écriture tant au niveau des paroles que musicalement. On ne sort pas en effet impunément "Here comes the Nazarene, look good in that magazine, Haile Selassie, they look after I" (Tricky Kid). De même comme son nom peut l'indiquer Ghetto Youth n'est autre qu'un ragga (à la sauce Tricky!). Et puis les habitués du petit bonhomme, en dépit d'écrire des albums de moins en moins accessibles, pourront toujours avoir quelques repères telle que la participation de la chanteuse Martina Topley-Bird comme sur le chatoyant Makes Me Wanna Die. Et puis les amateurs d'ambiance torturée devrait aussi trouver leur quota quotidien de noirceur, Vent, chanson ouvrant le LP étant un agréable hors d'oeuvre.

Au final un bon album de transition avant le cauchemardesque Angels With Dirty Faces.


Tricky - Christiansands

Cheval-Mouvement: le 1er Burger solo

Prouvant une fois de plus (encore que je n'avais point besoin d'une autre preuve de mon délabrement moral) que je suis bien à la ramasse ces temps ci (et vous ne subissez pas mes lamentations égocentriques nocturnes), j'ai appris en début de semaine que Rodolphe Burger venait de sortir un album solo. Certes, pas de quoi faire tourner les serviettes pour le commun des mortels, n'empêche le petit noyau d'admirateurs qui gravite autour du bonhomme a du se sentir plutôt soulagé.

Dix ans qu'on attendait un nouvel album solo, ce n'est pas rien. Cela dit, cette décennie fut loin d'être vide artistiquement... au contraire! Rodolphe a simplement multiplié les collaborations (James Blood Ulmer, Alain Bashung, Olivier Cadiot...), fondé une maison de disque, Dernière Bande, produit nombres d'artistes via son label (Fred Poulet, Alain Bashung, Chloé Mons, Jeanne Balibar...) ou pas (Jacques Higelin, Françoise Hardy). Et voici que No sport fait enfin son apparition. Mais aujourd'hui, pour changer, on va regarder dans le rétroviseur et s'intéresser au premier effort de Rodolphe Burger, lorsque ce dernier faisait encore parti du groupe Kat Onoma.

En 1993 Burger enregistre ainsi à Bruxelles son premier album solo Cheval-mouvement. LP qui se distingue des précédents efforts de son groupe (en particulier l'excellent Billy the Kid), ce dernier étant profondément minimaliste et principalement acoustique. L'une des forces du disque provient de son ambiance crépusculaire (The Shape of the Ground ouvrant l'album) appuyé par la belle voix grave de Burger. De même, en disant plus haut que Cheval-mouvement était majoritairement acoustique, ceci ne signifie pas que Burger suit la grammaire folk classique, ce qui sur le fond pourrait le rapprocher d'un Will Oldham alias Bonnie "Prince" Billy. De même, Burger n'oublie pas de brancher les amplis, histoire d'ajouter quelques couches de distorsions (Sing).

Au niveau des textes, les habitués de Kat Onoma ne seront pas non plus déstabilisés puisque Burger chante sur des textes d'Olivier Cadiot, Thomas Lago ou Jack Spicer. De même, comme il nous le prouvera sur ces prochains LP solo, nous avons droit à une reprise, et en attendant celle des Stones sur Meteor Show, Burger s'attelle à un des classiques de l'Iguane Iggy Pop, The Passenger (à noter que la vidéo d'aujourd'hui propose un rendu plus électrique que la version de l'album). Et puis il faut aussi noter que la chanson qui donne son nom à l'album en plus de faire parti des meilleurs créations de son auteur, n'est pas sans rappeler l'approche d'un John Coltrane via son My Favourite Things, Burger sur ses prochains disques n'hésitera pas ainsi à la ré-écrire totalement.

Cronico Ristretto : Breeding of Mind - O'Donel Levy (1972)

Présenté précédemment lors du premier volet des Funky front covers, les premiers habitués se souviendront peut-être de l'album Everything I Do Gonna Be Funky, du moins de sa pochette et de sa non moins mémorable paire des fesses couvées par de chaleureuses mains protectrices. Deux années auparavant, l'auteur de cet attentat fessier signait Breeding of Mind, qui à défaut d'émoustiller le regard, flattait les oreilles des amateurs de jazz funky.

Contrairement au disque précité, la pochette de cet album se veut sobre, ce qui ne l'empêche pas d'être terriblement groovy et chaleureux. Pour se faire O'Donel travailla avec le talentueux arrangeur Manny Albam (qui a sur son CV tout de même des collaborations avec Stan Getz, Count Basie ou Dizzy Gillespie). En suivant le canevas du jazz funky (très populaire à cette époque), ces derniers s'inspirèrent de diverses influences dont la pop baroque, mais également une production soul qui n'est pas sans rappeler les disques enregistrés par le label CTI.

Degradation Trip - Jerry Cantrell : post Alice in Chains year zero

Deux mois après la mort de Layne Staley, son ancien camarade de jeu d'Alice in Chains, Jerry Cantrell, sortait son deuxième effort solo. Or bien que l'album fut écrit avant le décès de Layne, en connaissant un peu le dossier AiC, il est vrai que plus grand monde se faisait d'illusion sur une quelconque « reformation » du groupe de Seattle. Dès lors pour l'admirateur d'un Would ? ou d'un Grind, à défaut d'être considéré comme une nouvelle véritable offrande, ce nouvel LP du compositeur principal d'AiC pouvait décemment faire office de madeleine.

Premier point au crédit de Degradation Trip, et contrairement à son précédent effort solo, Boggy Depot, Jerry s'entoure d'un véritable groupe avec des musiciens qui ont fait leur preuve à savoir Mike Bordin (ex-Faith No More) et Robert Trujillo (ex-Suicidal Tendencies, ex-Infectious Grooves et futur Metallica). Mais qu'en est-il du songwriting ?

Deuxième bon point à l'écoute du disque, Cantrell semble s'être fait plaisir, le monsieur passant en revue ce qu'il sait faire de mieux : du riff bien gras et poisseux à la ballade acoustique (sans forcément conter fleurette et sortir son petit bouquet d'églantines sur une quelconque colline).

En guise de hors d'œuvre, le LP s'ouvre sur Psychotic Break, titre efficace prouvant et rassurant sur sa capacité à encore composer des chansons au charme trouble. Avis qui se prolonge sur le rampant Bargain Basement Howard Hughes. Mais le constat reste par moment cruel, la voix d'ange déchu de Staley fait malheureusement défaut sur Spiderbite. L'un des points forts d'AiC était justement cette balance juste et fragile entre cette voix écorchée et les mélodies de Cantrell. Ne boudons cependant pas notre plaisir, car si reproche il y a, ce manque se distingue davantage sur les chansons les plus tordues de l'album. Angel Eyes est à ce titre parfait avec son refrain accrocheur.

A défaut d'avoir écrit un chef d'œuvre, Cantrell nous propose donc un album agréable, loin d'être transcendant mais qui contient tout de même plusieurs chansons excellentes. Très peu de déchets pour un album dont on  n'attendait finalement pas grand chose. Certes Cantrell aurait pu réduire le nombre de titres : du dispensable Mother's Spinning in Her Grace, au champêtre Give It A Name, en passant par la terrible faute de goût She Was My Girl. On s'amusera par contre de l'hommage déguisé à Peter Frampton sur Locked On...

Contrat rempli.




Funky front covers

Histoire de nous dérider un peu avant le week-end (ou en attendant la mort, c'est une question de point de vue), j'en profite pour lancer une nouvelle rubrique dans ce blog, à savoir intéressons nous de plus prêt à quelques pochettes méconnues qui feraient encore leur petit effet si elles sortaient de nos jours.

Pour ramener du people, il existe un terme porteur, non pas le sexe bande de pervers, mais bien sur, la musique funk (rah la feinte de la mort qui tue sa race).


Pour débuter voici donc (de gauche à droite), la pochette du groupe the Fatback Band, Night Fever sorti en 1976. Les connaisseurs pourront constater qu'on reste en terrain connu, la pochette du précédent LP, Yum Yum (tout est dans le titre) nous faisait en effet voir une jolie demoiselle s'amusant avec une sucette et portant un T-Shirt fortement humidifié... Cette fois-ci, en émettant l'hypothèse ô combien courageuse, qu'il s'agit toujours de la même demoiselle, on constatera que cette dernière reste toujours autant mouillée... C'est une question de feeling dirons nous... Sans doute la formation de funk se posait des questions sur les méfaits du body painting...

Anthony Hamilton: Soul man

La semaine dernière je faisais amende honorable, décevant encore un peu plus les amateurs de tripes et autres boucheries sonores (ceci dit, z'avaient qu'à aller sur mon autre blog...). Et bien aujourd'hui, je vais vous confier que décidément l'amateur de terrorisme sonore n'est pas à la fête ici mais qui plus est, l'auteur de ses lignes eu une grave désillusion hier en faisant quelques recherches sur la toile.

Depuis le temps que ça trottait dans mon crâne de piaf, j'ai décidé que je devais enfin chercher la réponse à une question que l'humanité avait trop longtemps ignoré. Réponse qui au cas échéant pourrait empêcher l'extinction de bon nombre d'espèces animales, et permettre de résoudre enfin les problèmes d'impuissance que connaît la population mâle de l'Extrême-Orient. Bref, le suspense est à son paroxysme, attention je lache le morceau... L'échalote est elle aphrodisiaque?

Et bien comme pouvait le laisser supposer ma réaction au début de ce post, je dois malheureusement vous annoncer qu'aucune étude ne démontre un quelconque pouvoir de la part de cette sympathique alliacée sur les corps caverneux de la gente masculine. Bref, la poudre issue de cornes de rhinocéros, d'os de tigre ou autre bile d'ours et soupe de nids d'hirondelles (pour les plus fortunés vous avez aussi la soupe de pénis de tigre) ont encore de beau reste... C'est ballot tout de même, cultiver des échalotes restait moins dangereux et plus facile, bref amère déception n'est il pas?

Après cette introduction, une fois de plus tirée par les cheveux (le pire c'est qu'on m'y encourage), quoi de mieux comme transition qu'un peu de musique sensuelle (si je n'avais pas encore perdu les quelques bouchers durant l'intro, clair que cette fois ci, ils vont disparaître). Bref, petit coup de projecteur sur un chanteur de soul qui finalement est surtout connu aux USA, et c'est bien dommage, réparons donc cette injustice (à défaut de résoudre les autres problèmes).

Les quelques habitués du blog savent que j'apprécie fortement Bill Withers, or il y a quelque temps j'eu la chance de découvrir un artiste qui fut présenté comme le pont manquant entre l'interprète de Hope She'll Be Happier et Bobby Womack (remember Across 110th Street la chanson qui ouvre Jackie Brown de Tarantino). Bref Anthony Hamilton mérite t'il ces comparaisons flatteuses?

Avant de répondre, il faut déjà noter que le garçon a collectionné quelques revers. Après avoir quitté Charlotte pour rejoindre NYC en 1993, Hamilton signe pour le label Uptown Records. Mais son premier LP ne sortira jamais, le label ayant mis la clé sous la porte... 3 ans après sort enfin son album XTC signé chez MCA, LP apprécié par la critique, mais qui ressemble encore au début d'une traversée du désert, puisqu'il lui faudra attendre encore 6 ans pour sortir un nouvel album solo. Entre temps, Hamilton se fait reconnaître par ses pairs et collabore ainsi avec D'Angelo lors de sa tournée, le "Voodoo Tour" en 2000. A noter qu'à cette époque, Hamilton avait signé avec le label Soulife, mais cette fois ci encore, son album n'a jamais eu droit à une sortie... le label faisant faillite (on appelle ça, la lose?).

Enfin bon la roue va plutôt tourner en son sens ensuite, après une nomination pour un Grammy pour sa collaboration avec le groupe Nappy Roots en 2003, Hamilton signe pour le label So So Def. La même année, il collabore avec le RH factor de Roy Hargrove sur son fameux Hard Groove où ce dernier fait appel à la crême de la soul contemporaine (Erykah Badu, D'Angelo...). Aux dernières nouvelles, un nouvel album devrait sortir prochainement. Au final, le père Hamilton méritait il ces comparaisons? Au regard du passé, et de la production actuelle, on peut effectivement admettre que tout ceci est finalement tout sauf putassier. A découvrir pour les amateurs de soul contemporaine.

Aujourd'hui un extrait sonore, Fallin in Love Again, et une vidéo, Magnolia's Room, issus d'une compilation, Southern Comfort, datant d'Avril 2007 qui permit à l'artiste de sortir des chansons rares ou inédites (vu les déboires qu'il a eu, certain qu'il doit en avoir pas mal encore sous le coude...).