Live report : Renegades of Rhythm : DJ Shadow & Cut Chemist play Afrika Bambaataa au Trianon - 22 février 2015

Partenaires de longue date, souvenons-nous au hasard de Product Placement, témoignage sonore d'une prestation scénique commune au début du millénaire, Josh Davis et Lucas MacFadden, alias DJ Shadow et Cut Chemist, se sont de nouveau associés cette année pour rendre hommage à l'un de leurs pères spirituels et fondateur de la Zulu Nation : Afrika Bambaataa. Figure incontournable des jeunes années du hip-hop, Bambaataa fut à l'instar de son comparse Grandmaster Flash l'un des pionniers du mouvement en tant que DJ, les deux hommes ayant connu la même année en 1982 la consécration publique, le premier avec le hit interplanétaire Planet Rock et son phénoménal sample de Kraftwerk, le second avec l'hymne historique The Message.

Toutefois comme le démontrèrent ce dimanche 22 février DJ Shadow et Cut Chemist, l'influence musicale d'Afrika Bambaataa dépasse largement ce succès populaire. Au contraire. Derrière les platines depuis les années 70, les block parties organisées par le DJ servirent de fondation au mouvement naissant avant de prêcher la bonne parole en dehors de son Bronx natal.

Cronico Ristretto : Monk's Dream - Thelonious Monk (1963)

L'histoire a été mentionnée précédemment ici-même. Jazzman singulier, Thelonious Monk dut, contrairement aux autres précurseurs du be-bop, Bird ou Gillespie en tête, attendre la fin des 50's pour obtenir le début d'une véritable reconnaissance publique et critique. Mieux, la nouvelle décennie lui offrira enfin la consécration attendue en le plaçant au panthéon des pianistes. Petit rappel des faits.

1962, Monk rejoint Columbia, label de son ancien comparse et bref sparring-partner musical [1], Miles Davis, avec lequel il enregistra une unique et mémorable session un 24 décembre 1954 (regroupée sur les deux albums essentiels Miles Davis and the Modern Jazz Giants et Bags' Groove). Détail amusant autour de ces deux illustres jazzmen aux caractères bien trempés, si l'ombrageux trompettiste enregistra pour le label Prestige une première version de 'Round Midnight, Davis intitula néanmoins son premier album pour la major du même nom que le standard de Monk en 1957. Fin de l'aparté.

Archie Shepp Attica Blues Big Band - Anthony Joseph - Festival Sons d'hiver, Fontenay-sous-Bois 6 février 2015

Dans le cadre du festival Sons d'hiver (du 23 janvier au 15 février) se tenait vendredi soir une double affiche des plus alléchantes : le chanteur originaire de Trinidad, Anthony Joseph, et l'un des derniers patriarches de la Great Black Music, Archie Shepp accompagné de son Attica Blues Big Band.

Découvert par le préposé en 2009 lors de la sortie de son album Bird Head Son, le choix du caribéen en première partie de Shepp pouvait difficilement être remis en cause à la lecture de ses influences et à l'écoute de ses diverses productions (de son premier disque en 2007 Leggo de Lion au récent Time en 2014 produit par la talentueuse Meshell Ndegeocello). Disciple des grandes musiques noires, Joseph brasse sans commune mesure les genres et les styles avec une facilité déconcertante. Entre les rugissements typiquement free jazz de son saxophoniste Shabaka Hutchings, ce poète combine avec grâce la soul 60's, l'exubérance funk 70's et les essences world. A la confluence entre le chanteur Leon Thomas et le saxophoniste David Murray et son ensemble Qwotet pour cette capacité à mettre en forme un carrefour d'influences multiculturelles, cet apôtre du rapso, mélange de rap et de calypso en provenance de son île originelle, et son Spasm Band offrirent une prestation chaleureuse et communicative aux spectateurs venus nombreux. Un régal pour les oreilles et une mise en bouche suprême avant l'arrivée du patriarche Shepp.

 

Horrible (Rosso sangue) - Joe D'Amato (1981)

Au sortir de leur cycle caribéen qui virent les complices Joe D'Amato et George Eastman écrire et réaliser pas moins de cinq films en République Dominicaine : Hard Sensation, Exotic Love, Sesso nero, Porno Holocaust et Erotic Nights of the Living Dead, le champion du cinéma bis transalpin et le géant génois revinrent sur leurs terres pour mettre en scène un nouveau film d'horreur au titre équivoque : Rosso sangue (Rouge sang). Profitant du succès de leur précédent effort cannibale en mer Égée, le craspec Anthropophagous (1980), et de celui des futures franchises étasuniennes Halloween et Vendredi 13, les deux italiens commettaient avec Horrible un diptyque des plus saignants et malsains.

Détail révélateur de cette turbulente année 1981 placée sous le signe du slasher et du gore, et de l'influence du renouveau du cinéma horrifique d'Outre-Atlantique, en sus du retour dans les salles obscures de Michael Myers et Jason Voorhees, les deux maîtres du cinéma bis européen Jess Franco et Joe D'Amato réalisèrent deux films [1] directement associés aux premiers méfaits de ces sinistres sirs ou assimilés [2]. Bloody Moon du madrilène n'était autre qu'une adaptation du métrage de Sean S. Cunningham [3], ou le massacre de jeunes allemandes dans une école de langue ibère. A son compère romain alors de convoquer dans Horrible l'esprit du psychopathe créé par John Carpenter et Debra Hill ? En partie seulement. Si Bloody Moon était en premier lieu une commande, Rosso sangue s'inscrivait en revanche dans les thématiques chères à D'Amato, et en particulier son goût prononcé pour un exhibitionnisme cru et viscéral propre à satisfaire les déviances et autres mauvaises pulsions de ses spectateurs consentants.