Guy Marchand - A Guy in blue

Voici presque un an et demi, je criais mon admiration pour le talentueux et tellement mâle Guy Marchand, de manière certes maladroite, mais que voulez vous quand l'affectif parle... La semaine dernière après mon périple de 4 heures dans les transports en commun, j'eus la surprise de recevoir en cadeau le dernier album de l'interprète de Tout en dansant la rumba, quelle ne fut pas mon émotion!

Ainsi Guy Marchand, après des albums tels que Emilio ou Nostalgitan pour ses dernières sorties où son amour pour les musiques latines, en particulier le tango, ressurgissait (on n'oubliera pas tout de même sa collaboration en 1975 avec le très grand Astor Piazzolla et la reprise de son célèbre thème Libertango sur Moi je suis tango), décide d'enregistrer enfin un véritable album de jazz gorgé de blues (pour rappel, Guy est clarinettiste de jazz de formation mais n'allons pas trop vite pour reprendre une expression chère à X).

Pour se faire notre homme est accompagné par André Charlier et Benoît Sourisse dont le CV a dû rassurer Guy sur les intentions du duo (John Scofield, Michel Portal, Mike Stern, Michel Petrucciani, Martial Solal, Didier Lockwood ou Jean-Jacques Miltau... on a vu pire). Ainsi, A Guy in blue voit notre pimpant jeune septuagénaire s'adonner à sa passion, d'un côté une formation réduite de jazz aguerrie et inspiré, de l'autre Guy jouant le rôle du crooner gouailleur.

Évidemment, à la première écoute le style vocal de monsieur Marchand a de quoi déstabiliser, bien qu'il reste suffisamment dans un registre sobre par moment, ce dernier ne peut s'empêcher de jouer quelques personnages, forçant le trait (Maudit Blues), le titi parisien faisant ainsi surface.

Hormis ce détail qui pourrait donc freiner quelques personnes, je reste abasourdi par la qualité de la musique (Facile à s'en rappeler, Si tu m'abandonnes), Guy Marchand est véritablement secondé par un groupe de première catégorie. On est très loin du cahier des charges inhérent à la variété française dans tout ce qu'elle a de plus méprisable. La musique de l'album oscille donc entre un jazz vocal lorgnant aussi bien du côté du blues, du bop que du jazz New Orleans, nous offrant même une petite escapade plus latine sur Dolorès (on se refait pas...) voire même funky (Fermé pour cause) par l'apport de ce bon vieil orgue Hammond cher à Jimmy Smith. On retiendra que l'album se clôt par la chanson très New Orleans, Mon Héritage, où Guy reprends sa clarinette le temps d’un chorus...

Au final, un album qui fera plaisir à ses admirateurs. Un grand monsieur ce Guy.





Is There Anybody out There? Merci Roger...

Au risque de passer pour quelqu'un qui a décidé de régler certains comptes, finalement quand on veut chasser le naturel, ce dernier vous revient toujours en pleine figure... Dès lors alors que vous aviez choisi de porter le masque de la zenitude (ou celui de l'hypocrisie, ça dépends aussi du tempérament de chacun), vous vous retrouvez avec ce bon vieux couteau aiguisé (et prêt à servir) entre les dents (je peux toujours même ça sur le dos de l'atavisme, mon grand-père paternel ayant été communiste...). Bref, ayant envie ces derniers temps de décider de me border de fiel, c'est reparti pour une chronique plutôt tiédasse.

Comme chacun sait ou devrait savoir, en 1979, le groupe de Roger Waters (Pink Floyd) publie son deuxième plus grand succès, The Wall, un concept album ô combien mégalomane... à l'image de son auteur vous pourriez ajouter. J'éviterai de faire la critique de cet album, enfin sa partie studio j'entends, n'étant premièrement pas le propos de ce billet et deuxièmement si je voulais mettre les formes il s'agirait de faire comme à l'école une belle thèse et antithèse, The Wall ayant les défauts de ses qualités (et au final doit sans doute avoir autant d'admirateurs que de détracteurs).

Non dans ce post, nous allons émettre quelques doutes (bel euphémisme) quant aux qualités de l'album live issu de la tournée de The Wall nommé: Is There Anybody out There? Tout d'abord, de quand date la sortie de cette merveille (quel mauvais esprit...)? A peu près vingt ans après l'enregistrement, soit en avril 2000. Dès lors, vous m'excuserez mais déjà personnellement ça sent pas bon. Bien sur on pourra toujours me rétorquer qu'un album live sorti vingt ans ou un an après son enregistrement ne change finalement pas grand chose, ça reste une chouette opération commerciale dans le but de mettre un peu de beurre dans les épinards à moindre frais dans la poche des producteurs et de la maison de disque. Il faut avouer qu'on cherche pour bon nombre de disques de ce genre l'utilité artistique. Sentiment qui aujourd'hui peut facilement s'amplifier étant donné avec quelle facilité on peut trouver désormais des bootlegs soundboard de très bonne qualité gratuitement sur la toile (comme sur les quelques liens que je propose sur ce blog).

Il n'empêche, grâce à Roger Waters, celui qui perdit le procès qu'il ne fallait pas perdre dans les années 80 (contre ses anciens meilleurs amis pour rappel David Gilmour et Nick Mason... Waters ayant forcé Rick Wright à vendre ses parts fin 70's), nous voici avec le disque live de la tournée The Wall (ironiquement les mauvais esprits pourront à juste titre ajouter qu'après le live de 90 à Berlin du père Waters, on en demandait pas tant...). Tournée qui d'ailleurs fut assez particulière puisqu'il y eut très peu de dates (LA, NYC, en Allemagne et à Londres à Earls Court il me semble), la logistique ne permettant pas une pléthore de dates (ce qui collait aussi avec le propos de l'album, Waters ayant l'idée d'écrire ce concept album après son écœurement des tournées gigantesques dans les stades).

Oui mais que reproches tu à cet album live hormis le fait d'être un enregistrement public? Déjà comme je l'ai écrit plus haut, en fait ce n'est pas tant la nature du disque qui me gène, il existe plusieurs disques live incontournables (le Live Dead du Grateful Dead ou l'apocalyptique Decade of Aggression de Slayer par exemple), certains faisant même office de meilleurs disques tout support confondu (comme le No Sleep 'Til Hammersmith de Motörhead encore que le débat reste ouvert pour ma part). Non le vrai problème c'est que ce disque (fournit dans un coffret qui de mémoire, comme le reste de la discographie de Pink Floyd d'ailleurs, coute bonbon) est plat, ce disque n'apporte rien, aussi bien au niveau de l'interprétation (que c'est mou...) que de la prise de risque. Certes pour cette dernière, le disque ne se prêtait pas à des improvisations, il n'empêche, sans compter que le côté pêchu soit aux abonnés absents, l'émotion aussi est en berne. J'en veux pour preuve les deux extraits sonores d'aujourd'hui, à savoir Don't Leave me Now et The Trial. Autant dans la version studio, on cherchait l'oxygène, le désespoir étant de mise pour Don't Leave me Now autant là... plouf plouf... Ok à l'écoute du morceau on ne fera pas tourner les serviettes pour autant mais où est la folie originelle? Et The Trial n'est pas en reste, quand on connait la version studio, cette fois ci on touche le fond, Waters se démenant comme un beau diable, mais est ce suffisant?

Mais ne chargeons pas trop la barque non plus. A vrai dire la comparaison avec l'album studio surproduit par Ezrin ne pouvait forcément ne pas tourner en la faveur d'Is There Anybody out There?, l'atmosphère si particulière de The Wall étant difficile à reproduire en public. Dans ce cas il aurait été préférable de non pas sortir ceci en disque mais de nous montrer le spectacle filmé, la pilule aurait été sans doute plus facile à avaler... sachant que pendant presque la moitié du set le groupe et ses musiciens additionnels jouent derrière un mur de briques factices (ceci dit selon les morceaux Waters et Gilmour réapparaissaient). Et puis pas certain que cela aurait fait double emploi avec le film d'Alan Parker... Dans les plus, on constate l'ajout de deux nouvelles chansons: What Shall We Do Now? et The Last Few Bricks, sauf qu'elles n'apportent pas grand chose (ok l'une d'entre elles permettaient surtout aux roadies de faire leurs petites sur la scène... la belle affaire)

En conclusion, un disque qui ne pourra plaire qu'aux fans die-hard du groupe, la durée de vie d'un tel objet étant très très limité. Quitte à écouter The Wall, autant jeter son dévolu sur la version originale studio.

New-York Noise: Big Apple sound 1978-1983

Loin d'être un fan des compilations (faut dire que ces dernières servent surtout de passe-plats, les majors les utilisant pour nous refourguer leur camelote pas fraîche...), on pourrait de prime abord commencer à émettre quelques réticences sur la dite compil, pourtant même avant de jeter une oreille sur le contenu, le mélomane curieux à la lecture des informations qui circulent autour du disque devrait commencer à avoir les yeux qui pétillent. Ainsi, le titre de cette compilation qui annonce déjà du lourd s'il on en croit la pochette: New York Noise: Dance Music from the New York Underground 1978-1983, compil ne provenant non pas d'une major mais d'un "petit" label Soul Jazz records, dont l'un des spécialités est justement de rééditer via des compilations des chansons disparues faisant parties d'un patrimoine musical plus ou moins underground (dub, post-punk, jungle, etc...).

Le propos de New York Noise (accrocheur comme patronyme, n'est ce pas?) est ainsi de nous présenter un panel des groupes obscurs officiant dans un mélange de genres des plus savoureux : NYC punk, funk, no wave, disco underground, post punk et autres courants expérimentaux.

Parmi les artistes redécouverts, le disque s'ouvre par le morceau Optimo des Liquid Liquid, qui officièrent de 1980 à 1983 dans un post punk groovy influencé par le dub et le funk. Et ma foi, le fan des Talking Heads devrait retrouver ses petits à l'écoute du bébé, une basse qui ne tient pas en place et des rythmes dansants rappelant les préférences world du David Byrne band. L'apparenté avec les géniteurs d'I Zimbra continue de plus belle avec le Baby Dee de Konk et sa géniale section de cuivres (de toute façon avant l'écoute du disque on savait l'importance des "têtes parlantes" sur la scène new yorkaise, mais la, ça en devient bluffant, comme sur Do dada de The Dance), un pont entre l'afro beat (Felaaaaaaaaaaaaaaaa!), le hip-hop, le funk et le post punk. A noter que la compil fait les choses bien puisque autour des deux groupes cités plus haut, gravitaient souvent les ESG ou Bush Tetras, et justement ils y sont! Les Bush Tetras nous proposant un rock dansant (plus j'écoute New York Noise et plus je repense au buzz des dernières années concernant les groupes de New York justement officiant dans le registre d'un rock dansant, je pouffe...) tandis que ESG sont surtout connus pour avoir été samplés par Big Daddy Kane, les Beastie Boys, Jay Dee ou Gang Starr (ah ouais quand même!).

Puis vient le premier All Star band on serait tenter de lancer, à savoir Material avec rien que moins Bill Laswell à la basse et Robert Quine à la guitare (toujours dans les bons coups celui là) pour un Reduction qui montre qu'un morceau peut être très bien à la fois funky et abstrait (une sorte de My Life in the Bush of Ghosts mais funk donc). Puis vient sur sa lancer un autre combo mené par un musicien loin d'être inconnu, DNA d'Arto Lindsay pour un 5:30 court mais dissonant annonçant par la même occasion la future trilogie des 80's de Sonic Youth, ce que va confirmer la 9ème piste Lesson No.1 for Electric Guitar de Glenn Branca (Thurston Moore et Lee Ronado ayant collaborés lors de leurs jeunes années avec le compositeur d'avant-garde), qu'on croirait tout droit sorti d'un Daydream Nation!

Histoire de ne pas oublier que New York est la ville qui nous offrit le mouvement hip-hop, le 7ème morceau nous gratifie d'un bon vieux rap old school (Sugarhill Gang and co...) Beat Bop emmené par Rammelzee et K.Rob, chanson inclue dans le documentaire culte de la culture hip-hop, Style Wars de 1983. Bref 10 minutes qui permettent aussi de constater que les Beastie Boys ont du être suffisamment bercés par ce morceau pour en reprendre certains gimmicks vocaux.

Parmi les autres artistes présents sur cette joyeuse compilation, on retiendra aussi Clean On Your Bean #1 de Dinosaur L alias Arthur Russel et la chanson clôturant le disque et qui donne son nom au groupe : Defunkt. Russel ayant la particularité d'avoir été compositeur et violoncelliste, d'avoir collaboré avec Philipp Glass ou David Byrne et par conséquent d'être aussi à l'aise dans les musiques dites populaires ou bien plus élitistes. De ce fait, Clean On Your Bean #1 nous convie à une musique qu'on pourrait toujours située dans le sillage d'un post punk mais très connoté funky le tout saupoudré de rythmes latins. Quant à Defunkt, groupe mené par Joseph Bowie, la chanson éponyme représente l'archétype d'un funk raide, bref collant parfaitement avec l'atmosphère dégagée par les groupes précédents.

Au final, une compilation qui est certes loin d'être indispensable mais qui devrait intéresser tous les aficionados de la musique new yorkaise de cette période et les curieux en général.



Extrait d'un concert de Defunkt jouant le morceau Avoid the Funk datant de 1981 live au Berlin Jazz festival