Carnet intime d'une thaïlandaise - Jean-Marie Pallardy (1980)

Il est toujours difficile d'entamer la première chronique d'un réalisateur dont vous suivez pas à pas la filmographie depuis seulement quelques mois. Un cinéaste sinon réhabilité (n'exagérons pas), dont une partie de l'œuvre 70's s'est vu tout du moins rééditée (par Le Chat qui Fume) offrant au public nostalgique un nouveau visage à Jean-Marie Pallardy. Très longtemps cantonné comme l'un des réalisateurs du mètre-étalon nanar, grâce ou à cause du célèbre White Fire (1984), l'ancien mannequin se lança rapidement au début de la décennie 70's dans la réalisation de films érotiques, laissant libre court à ses envies paillardes, emboîtant le pas à la libéralisation sexuelle... ou comment mêler l'utile à l'agréable.

Paul (Jean-Marie Pallardy) est photographe de mode. Un travail riche et exaltant, mais ces derniers temps la qualité de son travail est proche de la déliquescence. L'homme est ailleurs, prendre en photo les plus belles femmes du monde, dans les rues de la plus belle ville du monde, ne suffit plus à son bonheur. "De la merde [...], tu te concentres pas sur ton boulot, reconnais le" ajoutera son patron (Bernard Musson) dans un élan de sincérité poignante quoiqu'un peu paternaliste. A sa décharge, Paul a découvert, il y a peu, que sa femme s'adonnait au plaisir de la partouze. Les repères de notre photographe über-class tendent dès lors à vaciller dangereusement, lui qui se livrait corps et âme à son beau métier, trouvant le réconfort et l'inspiration nécessaire dans les bras des jeunes top-models qui croisaient sa route... et son objectif.


Mask of the Ninja - Bradford May (2008)

Il est des guerres auquel nul ne voudrait assister, et il est des héros contemporains dont le potentiel reste constamment sous-exploité. Admirer un Casper Van Dien la mâchoire tendue, un katana à la main sur la jaquette de Mask of the Ninja [1] augurait du meilleur, qui plus est lorsque vous apprenez que votre champion est convié à participer (bien malgré lui, mais n'allons pas trop vite) à une guerre où il n'était pas invité. Las, en dépit d'un hommage déguisé aux exploits martiaux d'un Joe Armstrong et des films de ninja produits par la sacrosainte Cannon...

L'inspecteur Jack Barrett (Casper van Dien) est un franc-tireur si on en croit les dires de sa collègue et néanmoins amie Gina (Bellamy Young). Membre de la police de Los Angeles, ce guitariste émérite [2] se voit embarqué dans une bien étrange affaire après la découverte de plusieurs cadavres assassinés par des ninjas. A charge pour Barrett de protéger la jeune Miko (Kristy Wu), seule survivante de cette tragédie et seul témoin de ce carnage...

La Jetée - Chris Marker (1962)

La Jetée du français Chris Marker [1] aura marqué le cinéma mondial... à ceci près qu'il ne s'agit pas véritablement d'un film, et encore moins d'un long-métrage. Œuvre influente depuis un demi-siècle, son sujet et son traitement radical auront ainsi inspiré nombre de cinéastes. Mieux, on aurait tort, une fois n'est pas coutume, de ne pas ajouter à ce chef d'œuvre la mention culte, tant La Jetée fut, il n'y a pas encore si longtemps, une œuvre marquante, mais adressée à un public d'initiés [2].

« Ceci est l'histoire d'un homme marqué par une image d'enfance. La scène qui le troubla par sa violence, et dont il ne devait comprendre que beaucoup plus tard la signification, eut lieu sur la grande Jetée d'Orly quelques années avant le début de la Troisième Guerre Mondiale ». Un dimanche en famille, un soleil fixe, un décor planté au bout de la Jetée et un visage, celui d'une femme, voici le dernier souvenir de l'homme. « Dernière image d'un temps de paix ayant traversé un temps de guerre ». Puis un bruit soudain, un corps qui bascule... « plus tard il comprit qu'il avait vu la mort d'un homme ».

Coltrane, A Love Supreme: Paolo Parisi (2010)

En préambule et à l'attention des amateurs de l'album Blue Train de John Coltrane, ne pas trop se fier à la couverture de cette bande dessinée éditée en France par Sarbacane en septembre 2010. Le visage de Trane, et en particulier son regard vide, pourrait être source d'interrogation et de doutes quant au contenu de cette BD initialement paru en Italie en mars 2009. Et pourtant...

L'auteur transalpin Paolo Parisi propose en quatre chapitres, ceux même qui composent le chef d'œuvre de 1964 A Love Supreme (Acknowledgement, Resolution, Pursuance et Psalm), de retracer de manière non linéaire la vie du saxophoniste américain, de ses débuts et sa rencontre avec un célèbre trompettiste, Dizzy Gillespie, jusqu'à sa mort à l'âge de 41 ans des suites d'un cancer du foie en 1967.

Inspiré en grande partie par le livre John Coltrane: His Life and Music de Lewis Porter paru en 1998, Parisi s'attache ainsi à montrer au cours d'une centaine de pages les différents traits qui caractérisent le mieux la riche personnalité de Trane et son Graal personnel, sa recherche perpétuelle du SOUND. Une biographie où les grands traits de sa vie sont évoqués, ses rapports privilégiés avec Eric Dolphy et l'émulation qui en découla, ceux avec Miles Davis et l'enregistrement du divin Kind of Blue, son passage chez Thelonious Monk et l'empreinte libératrice qu'elle initia chez lui, ou encore sa rencontre avec ses deux compagnons de route, sidemen de son fameux quartette, le pianiste McCoy Tyner et le batteur Elvin Jones.
 

Cronico Ristretto: Senior - Röyksopp (2010)

Après le foncièrement pop et printanier Junior (2009), le duo norvégien Röyksopp remet rapidement le couvert cette année avec son jumeau instrumental Senior, ou la face sombre du disque précédent ? N'allons pas trop vite...

Car autant Junior débordait de légèretés faisant la part belle au meilleur (?!) des musiques électroniques des vingt et trente dernières années, autant le dernier disque de la paire Berge & Brundtland, pourrait prétendre, à l'image de son titre, à être son versant sage,  croulant, voire soporifique ; enfin c'est ce pourrait prétendre l'adepte d'un "jeunisme" eighties.

A l'inverse, Junior pourrait se résumer par ses rythmes bondissants échevelés digne d'un Giorgio Moroder 2.0, son lot de chanteuses scandinaves ersatz d'Alison Goldfrapp [1], en somme un album de son (triste) temps synthétisant idéalement les errements de l'électropop putassier des 00's dont Senior se devait d'être dès lors le versant opposé. Match nul, balle au centre. Voici l'heure de faire les comptes.

The Bride Screamed Murder - Melvins (2010)

Et voici que déboule cette année The Bride Screamed Murder le nouvel album des inoxydables Melvins soit le groupe du non moins increvable King Buzzo accompagné, comme il se doit, par son marteleur de futs en chef, Dale Crover, et secondé pour la troisième fois depuis quatre ans par l'assise rythmique du trio Big Business (Jared Warren et Coady Willis).

Hormis quelques fans purs et durs, difficile d'admettre que les Melvins n'ont pas connu une parenthèse flottante après leur excellent Stag (1996), leur signature sur le label de Mike Patton n'ayant seulement en partie résorbé ce « passage à vide » avec l'apparition de leur trilogie expérimentale The Maggot/The Bootlicker/The Cry Baby sortie à l'orée du nouveau millénaire (1999-2000). Et si affirmer que, durant le début du nouveau millénaire, la bande à Buzzo avait perdu de sa superbe parait exagéré, les fulgurances ne manquant pas, force est de constater que la dispersion était de mise, à l'image des collaborations avec Jello Biafra ou Lustmord. Bref, les Melvins ressemblaient de moins en moins au groupe efficace de la première moitié des 90's pour devenir un groupe expérimental proche de l'inconstance. Or 2006 allait sonner le réveil du groupe après une longue pause de quatre ans.
 

Cronico Ristretto: Ni - Ni (2010)

Ce qui prend l'aspect d'un tiroir d'aspect minéral ayant occupé trop longtemps une cave humide où quelques moisissures auraient décidé d'y élire domicile n'est pas des plus ragoutants de prime abord, une fois ouvert le dit tiroir... Niiiiiiiiiiiiiiiiiiii

Fraichement signé chez Noir Prod, voici que débarque en provenance de Mâcon, la formation Ni issue de deux groupes appartenant à la scène locale bourguignonne, JMPZ et Diatrib(a). Si Ni garde l'ossature principale de feu Diatrib(a) (à savoir deux guitaristes et un batteur) s'adjoignant les services de l'ancien bassiste de JMPZ, cette nouvelle mouture n'en demeure pas moins légèrement différente, évitant le raccourci des New Diatrib(a) ou des Diatrib(a) 2.0.

Formé en 2009, voici qu'apparait le premier EP composé de quatre chansons au titre évocateur: Gros gibier, Ni truite Ni cerise, Poppy et Balafré par une dinde morte

Cronico Ristretto: Boris At Last - Feedbacker (2003)

A défaut d'être comme l'Iguane, de croire que le fait d'être exposé aux amplis et aux guitares électriques peut modifier l'alchimie d'un corps [1], la saturation ou autres riffs bruitistes ont depuis très longtemps provoqué un attrait particulier chez ma personne... pas tant guidé par un désir inavouable d'acouphénïte aiguë mais le sentiment paradoxal d'une certaine quiétude face à ces assauts saturés, une extase hautement sensorielle pouvant paradoxalement offrir un large panel de couleurs, riches à l'écoute de The Diamond Sea des Sonic Youth ou froides et déshumanisées chez Godflesh (Pure II). Une alternance de chaud et froid à l'image du Feedbacker des japonais Boris.

Si sur leur premier album (Absolutego), la formation en provenance de Tokyo menée par Atsuo (batterie/chant), Wata (guitare) et Takeshi (basse/guitare) se fondait clairement dans le moule d'un metal drone, trivialement une version kamikaze de Earth s'acoquinant avec les secousses telluriques d'un Sleep, le patronyme du groupe ne laissait que peu de place aux mystères, leur principale influence ou prochaine ligne de conduite se prénommait The Melvins.

Un colt pour trois salopards (Hannie Caulder) - Burt Kennedy (1971)

Pourquoi ne pas s'attarder un instant sur le dénommé Hannie Caulder, ou l'une des sources (méconnues) ayant inspiré les aventures vengeresses de la vénéneuse Beatrix Kiddo de Quentin Tarantino ?

Les frères Clemens, aussi crasseux que bas du front forment de piètres hors-la-loi, mais n'en restent pas moins de dangereux bandits malgré leurs maigres butins récoltés au gré de leurs attaques toutes plus claudicantes les unes que les autres. Ce trio, qui a la caractéristique de partager un cerveau pour les deux ainés, Emmett (Ernest Borgnine) et Frank (Jack Elam), les quelques synapses restantes étant l'usufruit du dénommé Rufus Clemens [1], fuit l'armée mexicaine après un énième échec à mains armées. Pourchassés par les soldats, les Clemens s'arrêtent à un relais pony express pour y voler des chevaux. Fraîchement accueilli par le propriétaire, Rufus (Strother Martin) tue ce dernier et est réquisitionné pour récupérer quelques victuailles lorsqu'en ouvrant la porte du relais postal Rufus découvre... le décolleté de Mme Caulder (Raquel Welch).