Brigitte Lahaie, L'amour c'est son métier : 1976 - 1980


Chronique précédemment publiée dans le numéro 28 de la revue L'Indic, Noir magazine.

Brigitte Lahaie : céder à la tentation de vouloir résumer ses cinq années dans le cinéma X par le titre du film de l'iconoclaste José BenazerafL'amour c'est son métier, est des plus séduisantes. Mais si l'amour pouvait prendre diverses formes sur grand écran chez cette icône du cinéma d'exploitation, les métiers exercés par la belle l'étaient tout autant. A charge pour le rédacteur de ce billet de répertorier, consciencieusement, les professions fantasmatiques (du moins présentées comme telle) pratiquées par celle qui imposa, avec grâce, sa sculpturale présence dans les productions Alpha France et consorts, de ses premiers pas en 1976 à son arrêt du X en 1980.

Sexploitation oblige, on ne s'étonnera pas de compter dans les rangs, en premier lieu, le plus vieux métier du monde, dans les classiques Belles d'un soir de Claude Mulot, Bordel S.S. de José Benazeraf ou Call Girls de Luxe de Gérard Kikoïne. De la prostituée Doris, accompagnée de ses deux copines Martine et Mimi (Martine Grimaud et Véronique Maugarski), à la recherche de la liberté, à la fille de joie travaillant en réalité pour la Résistance, recueillant les confidences sous l'oreiller des vils officiers allemands, à l'homonyme Brigitte jouant les muses pour son client Richard (Richard Allan), atteint du syndrome de la page blanche, la dame aura livré tout un panel prestations tarifées divers et variées qui la mèneront en toute logique au rôle suprême de tenancière à la fin de sa carrière sous X. Les petites écolières de Claude Mulot virent Brigitte Lahaie interpréter le rôle d'une ex-directrice de maison-close, forcée de se reconvertir en responsable d'une pension un peu spéciale pour jeunes femmes inexpérimentées. Un rôle sur-mesure, en quelque sorte, pour une actrice au sommet de sa gloire pornographique, que les connaisseurs pourront attacher à celui d'entremetteuse libertine qui lui offrit Burd Trandbaree, alias Claude Bernard-Aubert, dans La rabatteuse.

Moins trivial, sans toutefois faire preuve d'une originalité certaine au panthéon des obsessions de nos amis pornocrates, viennent ensuite les professions de secrétaire et d'infirmière, auxquelles bien entendu, dame Brigitte mis beaucoup d'applications à faire resurgir leurs potentiels érotiques (sans omettre de faire resurgir toutes les ambiguïtés permises avec ses patrons et ses clients/patients). A ce petit jeu des clichés, l'amateur se souviendra du réalisateur Claude Pierson qui mit en scène par deux fois Brigitte, une première fois en secrétaire dans Chaleurs intimes, et l'année suivante dans Bouches expertes afin de démontrer à ceux qui en doutaient encore la technique de son actrice en matière de bouche-à-bouche. D'une profession médicale à une autre, et avant de devenir sa muse à la fin de la décennie en jouant dans ses Raisins de la mort, premier film gore français revendiqué, puis dans le culte Fascination, la toute jeune Brigitte incarna une psychanalyste dans les Vibrations sexuelles du dénommé Michel Gentil, ou l'habituel pseudonyme de Jean Rollin, quand ce dernier signait ses films pornographiques alimentaires au mitan des années 70. Une Brigitte aux méthodes thérapeutiques éprouvées qui soignera le séduisant Alban (Alban Ceray), désormais incapable d'éprouver tout plaisir, par une investigation poussée des processus psychiques de son patient en mal d'épanouissement charnel : "Je dois dire que votre rêve est assez fascinant. Il dénote dans votre esprit un don poétique certain. Cela se devine à la manière dont vous le racontez. Si nous nous en tenons aux faits, vous avez un rêve érotique dans lequel vous participez en faisant l'amour avec un des personnages. Mais votre narration, vous entourez l'histoire d'un langage intellectuel qui, d'une part, la magnifie, et, d'autre part, lui retire tout obscénité".


Mais si le préposé à ce billet devait finalement retenir une profession en guise de conclusion, oubliant bien vite celle de vendeuse dans Couples en chaleur de Sam Corey, alias Jean Luret, ou encore celle de bonne dans Secrets d'adolescentes de Roberto Girometti et Gérard Loubeau, il s'agirait sans aucun doute de son rôle d'actrice pornographique dans la brillante mise en abyme nommée La Vitrine du plaisir de Gérard Kikoïne, docu-fiction réalisé à partir des rushes de son premier film hard, Parties fines. Jubilatoire.


Filmographie sélective par ordre chronologique et par profession : 

Vibrations sexuelles (1976) - Jean Rollin : psychanalyste
Belles d'un soir (1977) - Claude Mulot : prostituée
Chaleurs intimes (1977) - Claude Pierson : secrétaire
Couples en chaleur (1977) - Sam Corey : vendeuse
Parties fines (1977) - Gérard Kikoïne : baronne
Vitrine du plaisir, La (1977) - Gérard Kikoïne : actrice
Bouches expertes (1978) - Claude Pierson : infirmière
Bordel S.S. (1978) - José Bénazéraf : prostituée, résistante
Ondées brûlantes (1978) - Jack Régis, Bernard Lapeyre : secrétaire
Rabatteuse, La (1978) - Burd Trandbaree : entremetteuse
Call Girls de Luxe (1979) - Gérard Kikoïne : call girl
Grande mouille, La - Burd Trandbaree (1979) : chasseuse occasionnelle
Photo scandale - Patrick Aubin (1979) : ex-prostituée, maitre-chanteuse
Petites écolières, Les (1980) - Claude Mulot : directrice de pension
Secrets d'adolescentes (1980) - Roberto Girometti, Gérard Loubeau : bonne


Crédit photos : La Vitrine du plaisir, Alpha France production.

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