Cronico ristretto : Premier contact (Arrival) - Denis Villeneuve (2016)

Présenté en avant-première au Festival de Venise en septembre 2016, Premier contact, premier film de science-fiction du cinéaste québécois Denis Villeneuve, avant en fin d'année son attendu Blade Runner 2049, fut marqué à sa sortie autant par un consensus critique, qu'un succès au box-office. Mieux, le métrage confirmait la possibilité de produire encore de nos jours un film de SF sans forcément verser dans le grand spectacle ou la série B surboostée. De par son ambition à vouloir toucher un public plus vaste, tout en s'attachant à traiter de thématiques science-fictionnelles, Premier contact avait le mérite apparent de vouloir ainsi s'éloigner du genre traditionnel et d'y apporter un sang neuf bienvenu. Las. Mais n'allons pas trop vite...   

Douze vaisseaux extraterrestres apparaissent à différents endroits du globe. L'armée américaine par la présence du colonel Weber (Forest Whitaker) dépêche l'experte en linguistique comparée, Louise Banks (Amy Adams), afin de pouvoir établir un contact avec les extraterrestres qui ont posés un de leurs vaisseaux dans une vallée du Montana. Avec l'équipe composée du physicien théoricien, Ian Donnelly (Jeremy Renner), Louise devra découvrir les intentions de ces mystérieux aliens. Au cours de sa mission, Louise est sujette à des flashbacks où apparaît une fillette qui semble être sa fille...


Adaptation de la nouvelle L'Histoire de ta vie de Ted Chiang, le scénario de Premier contact s'inspire, on l'aura vite compris, ouvertement du classique de Steven Spielberg, Rencontres du troisième type, et plus récemment (il fête tout de même ses vingt ans cette année) de Contact de Robert Zemeckis. D'un récit science-fictionnelle dit adulte, le film suit malheureusement la même trajectoire que les décevants et contemporains Interstellar ou Gravity. Fort de vouloir contenter un plus large public, le scénariste Eric Heisserer joue la facilité en versant dans le mélodrame grossier et le dialogue lourdingue. Pire, non content de faire subir à son héroïne (et aux spectateurs) le deuil d'une enfant qui n'est pas encore née (et en sus une morale pro-vie bien visqueuse à souhait), le film s'englue dans sa conclusion vers un prêchi-prêcha Terrencemalickien post-Tree Of Life (1), point final d'une histoire boursouflée (2).


Ajoutons à cet amalgame mal dégrossi une accumulation d'incohérences ou de questions sans réponse frôlant l'overdose portnawak dont la seule justification est régie par le cadre supposé de la science-fiction (3) : Louise a une minute pour décrypter l'extrait sonore fourni par le colonel, un assimilé entretien d'embauche qui se solde certes par un semi-échec, mais ne l'empêchera nullement de décrypter miraculeusement (l'ellipse utilisée laisse songeur) par la suite le langage des heptapodes ; militaires qui semblent d'ailleurs ne devoir rendre de comptes à personne, et dont un petit groupe de soldats décidera benoîtement de détruire l'immense vaisseau avec quelques pains de C4 ; le rôle et l'apport du physicien Ian Donnelly se réduit finalement à sa seule fonction de futur géniteur d'une fillette cancéreuse, etc.

Décevant, prétentieux, grotesque, réactionnaire, la coupe est pleine. De bon augure pour la séquelle du chef d'œuvre de Ridley Scott...



Arrival (Premier contact) | 2016 | 116 min
Réalisation : Denis Villeneuve
Scénario : Eric Heisserern d'après la nouvelle de Ted Chiang "Story of Your Life"
Avec : Amy Adams, Jeremy Renner, Forest Whitaker, Michael Stuhlbarg, Mark O'Brien
Musique : Jóhann Jóhannsson
Directeur de la photographie : Bradford Young
Montage : Joe Walker
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(1) A défaut d'offrir une plus large place au petit dinosaure de la pompeuse Palme d'or de 2011, Villeneuve propose deux aliens heptapodes croisés avec un calmar, nommés pour l'occasion Abbott et Costello...

(2) Sans oublier le couplet géopolitique binaire où, une fois n'est pas coutume, les États-Unis sauvent finalement le monde, après quelques tergiversations, par la voie pacifiste face aux belliqueux russes et chinois...

(3) Paradoxalement, dans le mot composé science-fiction, de nombreux scénaristes et réalisateurs ne retiennent que le dernier terme, ouvrant la voie à une autoroute de divagations et d'incohérences que seul l'aspect fantastique devrait justifier.
 

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