Live report : Bongripper + Suma + Ghold - Glazart, Paris, 30 mai 2016

Pour paraphraser Pierre Desproges, « Tout dans la vie est une affaire de choix ». Or un dilemme cornélien s'offrait au préposé docteur à la chronique le 30 mai sur Paris : le concert des chicagoans Bongripper, ou bien celui des montréalais Sunns dans le cadre du festival Villette Sonique. Les papes du doom instrumental ayant dégainé les plus vites, l'issue était prévisible, ce qui n'empêcha nullement une pointe d'amertume et une légère déception face à cette prise de décision arbitraire : préférer une formation n'ayant jamais posé auparavant un pied sur le sol français, au détriment des géniteurs de Hold-Still ou l'un des albums marquants de l'année 2016. Fort heureusement cette soirée au Glazart du 30 mai allait faire oublier cette mésaventure (1).

Apparu au mitan des années 2000 à Chicago, Bongripper (clin d'œil décalée au Dopesmoker de Sleep) sont devenus au fil du temps une référence en matière de metal lourd dans le milieu underground. En 2010, les quatre musiciens gagnent en popularité après la sortie de leur cinquième album, le très remarqué Satan Worshipping Doom (chroniqué par nos soins à l'époque ici), soit la synthèse de leur doom dronien avec un black metal originel. Mieux, le disque leur ouvre enfin les portes de l'Europe en étant à l'affiche pour deux concerts au festival néerlandais Roadburn du 14 au 15 avril 2012, où fut joué le premier jour l'intégralité de SWD, avant de retraverser l'Atlantique l'année suivante pour leur première tournée sur le seul sol britannique. Quatre ans plus tard, une éternité pour un groupe qui enregistra pas moins de quatre albums entre 2006 et 2008 (2), Bongripper sort en juillet leur dernier album en date, Miserable, confirmant autant leur statut culte que la quintessence de leur art doom (avec en sus un nouveau passage au Roadburn en 2015 pour deux dates et l'intégralité de Miserable). 2016, Bongripper débute dix ans après leur début sa première et véritable tournée européenne, huit dates passant par la France, la Belgique, l'Allemagne, les Pays-Bas et enfin la Grande-Bretagne, du 29 mai à Nantes au 5 juin à Manchester.
           
Accompagnant Bongripper le temps de la dite tournée, les londoniens de Ghold avaient la charge d'ouvrir la soirée. Formé en 2012, après une démo et deux albums distribués en édition limitée, ce groupe de doom sludge a signé depuis 2015, deux albums sur le label Ritual Productions (Bong, Horses Latitudes, Ramesses), dont PYR, sorti début mai de cette année. Dirigé par le bassiste Aleks Wilson et le batteur Paul Antony, auquel s'est adjoint désormais le guitariste Oliver Martin, les trois musiciens assénèrent une prestation sourde, le duo originel martelant des rythmiques on ne peut plus massives. Principalement axé sur leur dernier disque dont la pièce maitresse Despert Thang, le set de Ghold évoquait un pont jubilatoire entre les premiers Ufomammut et une version actualisée du sludge barré des Melvins époque Lysol. A suivre.

 

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Setlist :
01. All Eyes Broke / 02. Despert Thrang / 03. CCXX / 04. Collusion With Traitors
  
   
Révélation de l'année 2010 avec leur album Ashes, Suma avaient disparu de la circulation sans crier gare peu après ce retentissant troisième disque. De retour en France pour cette seule date parisienne, avant la sortie prochaine, le 11 octobre, de leur nouvel album intitulé The Order of Things, la venue des suédois avait de quoi intriguer. Avec une batterie placée au centre la scène, toute ambiguïté était levée, la prestation allait être percussive ! En un peu moins d'une heure, le quatuor mené à la baguette (pouf pouf) par le dénommé E. offrit une prestation plutôt convaincante à défaut de véritablement briller, la faute à un bassiste / vocaliste peu audible (et encore moins charismatique - de toute façon l'assistance n'avait d'yeux (et d'oreilles) que pour le batteur), et des samples silencieux qui font pourtant partie intégrante de l'atmosphère noisy du groupe. En demi-teinte. En attendant le prochain disque dont les premiers extraits semblent (par contre) de bon augure. 

 

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Une fois réglés les problèmes de batterie qui retardèrent légèrement l'ouverture des hostilités, Bongripper put entamer les premières mesures du redoutable Hail. Avec une setlist basée essentiellement sur les deux derniers albums, deux titres chacun, le groupe n'eut aucun mal à soulever l'enthousiasme des cervicales du public parisien. Avec ses deux guitares cyclopéennes forgées par la paire Dennis Pleckham et le véloce Nick Dellacroce, une basse monstrueuse domptée par Ronald Petzke, et une batterie post-apocalyptique exécutée par Daniel O'Connor, le rouleau compresseur Bongripper était en marche.
 
Soixante-dix minutes de transe doom plus tard, le constat était sans appel : lourde, hypnotique, dissonante, la musique des chicagoans en concert n'avait rien perdu de sa superbe toxique. 

Culte. 
 
 

 

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Setlist :
01. Hail / 02. Descent / 03. Worship / 04. Endless

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(1) Consolation, le concert des Sunns est disponible sur le site internet d'Arte, à l'instar de celui de Kamasi Washington auquel nous avons pu assister en chair et en os.

(2) Une  « pause » mise à profit pour enregistrer un EP Sex Tape / Snuff Film en 2011 ainsi que deux splits avec les groupes Hate et Conan en 2013.
  

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