Intimate Night with Stanley Clarke Band - New Morning, Paris, 26 juillet 2015

Habitué des salles de plus grande taille, le bassiste Stanley Clarke faisait une fois n'est pas coutume entorse à la règle, comme le soulignait l'intitulé du concert du dimanche 26 juillet, en se produisant au New Morning. Non sans une certaine appréhension, celle-ci confortée le soir même en écoutant d'une oreille distraite les propos passionnés des fans de jazz fusion présents, le préposé s'était toutefois résolu, et vite décidé, à assister à ce concert dès son annonce officielle, et ceci, quelque soit les supposés risques encourus...

Riche d'une quarantaine d'albums, la production discographique de ce quadruple récompensé aux Grammy Awards est à l'image de ce multi-instrumentiste, compositeur, chef d'orchestre, interprète, arrangeur, producteur, et compositeur de musiques de films (Boyz N the Hood) : versatile, au risque de s'aventurer très souvent dans des territoires éloignés du jazz, et d'apparaître paradoxalement comme un jazzman qui œuvra davantage en dehors de son cercle musical au grand dam des amateurs de la Great Black Music. En faisant fi donc des nombreux avertissements qui parsèment la discographie du bassiste, son lucratif virage funk dans les 80's ou plus cruellement, le manque de disques notables postérieurs à sa production 70's, l'envie de découvrir en chair et en os ce talentueux musicien se fit toutefois plus forte. 

 

De retour avec un nouvel album intitulé Up sur le label Mack Avenue, après une série de concerts en duo et en acoustique avec Chick Corea en 2014, Stanley Clarke poursuit désormais son voyage musical en quartette avec le pianiste Beka Gochiashvili, 19 ans, le batteur Michael Mitchell, 20 ans, et le claviériste Cameron Graves, 26 ans. Non content de s'entourer de jeunes musiciens prometteurs, les deux cadets ayant collaboré au dernier album du maestro, on soulignera également la clairvoyance de Clarke en ayant fait participer à l'enregistrement de Up, l'une des sensations jazz de 2015, Kamasi Washington, auteur d'un dantesque triple album The Epic. Ajoutons que Graves croisa, à tout juste 16 ans, Washington au sein de la formation Young Jazz Giants en 2004, aux côtés de Steve et Ronald Bruner (basse et batterie), Ronald étant présent sur les deux derniers disques du bassiste, sur le dernier feu George Duke et enfin sur celui de Washington. La boucle est bouclée. 

Et le concert ? La crainte d'assister à une prestation jazz funk aseptisée fit long feu. Fort heureusement. Sur scène, accompagné de deux synthétiseurs, Stanley Clarke débuta certes à la basse, le temps de faire éclater au besoin son groove et sa technique, mais celui-ci abandonna rapidement son instrument électrique fétiche, pour prendre en main sa contrebasse, qu'il ne quitta plus durant les deux sets du concert (en attendant bien évidemment un rappel au contenu des plus évidents, mais n'allons pas trop vite).

 

Fort d'une cohésion bluffante compte tenu de l'âge des protagonistes, en particulier Gochiashvili dont les expressions et le jeu au piano évoquent un juvénile Keith Jarrett ou le très percutant Mitchell, le quartette revisita en plus de deux heures le répertoire de leur leader, de Brazilian Love Affair, reprise de l'ami George Duke [1], présente sur Up, à Song to John (Journey to Love - 1975) que la formation jouera par deux fois à chaque set. De quoi faire oublier les doutes évoqués plus haut et un dernier disque à la production bien trop tendre et au rendu fade ? Oui, dans son ensemble. Seul bémol : les interventions (discrètes) de Cameron Graves et en particulier le son de son instrument, qui met en lumière l'attrait toujours vif que peut avoir Clarke pour les sonorités synthétiques eighties [2]

Enfin les quatre musiciens jouèrent le temps du rappel l'incontournable School Days enrichi du fameux chorus de l'éternel Mothership Connection (Star Child) de Parliament "If you hear any noise, It's just me and the boys".

 


Stanley Clarke Band
Stanley Clarke (Basse, Contrebasse)
Beka Gochiashvili (Piano, Synthétiseur)
Cameron Graves (Synthétiseurs)
Michael Mitchell (Batterie)

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[1] Coïncidence, aujourd'hui 5 août, le jazzman nous quittait il y a tout juste trois ans.

[2] Un goût particulier pour ses sonorités toc que Clarke partage avec son collègue bassiste Marcus Miller. Il faut écouter les interventions en live des synthétiseurs de leur projet commun SMV pour établir l'ampleur des dégâts...

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