A Matter of Life and Death - Michael Powell / Emeric Pressburger (1946)

Neuvième collaboration du duo Michael Powell / Emeric Pressburger, A Matter of Life and Death s'inscrirait dans la même lignée que son ainé sorti cinq années plus tôt 49th Parallel. Commande de l’armée britannique, le long métrage fut à l'origine produit dans le seul but d'harmoniser et d'améliorer les relations entre les soldats alliés anglais et étasuniens. Des raisons suffisantes pour avoir de sérieux doutes sur l'authenticité de la démarche des futurs réalisateurs de The Red Shoes ? Au contraire. Carlotta nous propose de revoir ce classique en version restaurée inédite au cinéma depuis mercredi dernier.

Durant la Seconde Guerre mondiale, de retour vers l'Angleterre après un bombardement en Allemagne, l'avion de l'officier britannique Peter Carter (David Niven) est en flammes. Dernier homme à bord vivant et sans parachute utilisable, celui-ci se sait condamné. Ses derniers mots, il les confie à une jeune opératrice radio prénommée June (Kim Hunter) avant de sauter dans le vide. Mais Carter survit miraculeusement et retrouve celle qui fut sa dernière confidente. Les deux jeunes gens tombent immédiatement amoureux l'un de l'autre, jusqu’à ce qu’un messager de l’au-delà (Marius Goring) vienne dire à Peter que sa survie n’était qu’une erreur dû au brouillard. Ce dernier décide de faire appel pour rester sur Terre et vivre son amour avec June. Un tribunal céleste est dès lors convoqué pour décider de son destin.


A la lecture du synopsis et comme le laisse deviner son titre étatsunien, Stairway to Heaven, Une question de vie ou de  mort n'a rien du prétexte humaniste cachant un basique film de propagande. De cette histoire d'amour surnaturelle, Powell et Pressburger tissent une romance marquée par le Surréalisme et regorgeant d’inventions cinématographiques et d'effets spéciaux novateurs. Sublimé par la photographie audacieuse de Jack Cardiff, dont ce sera la première collaboration [1] avec les deux cinéastes, le film est scindé ingénieusement entre deux lieux : le ciel, monde des morts où le temps n'a plus cours [2], est filmé en noir et blanc, et la Terre, monde des vivants et des émotions, est filmée en un chatoyant Technicolor.

Porté par un jeune David Niven et la débutante Kim Hunter, future héroïne d’Un tramway nommé Désir, et engagée sous les conseils d'Alfred Hitchcock, le film surprend par son récit ambiguë et fantastique. Tout au long de l'histoire, Powell et Pressburger laissent planer le doute sur la santé mentale de leur personnage principal. Soigné par le docteur Reeves (Roger Livesey), celui-ci diagnostique à Carter des complications cérébrales qui seraient la cause de ses hallucinations. La frontière entre cause rationnelle et surnaturel est ainsi entretenue jusqu'à la dernière scène où le jury via un « escalier céleste » est convié à rencontrer June sur Terre lors de l'opération de Peter ; le neurochirurgien pouvant le sauver d'une folie annoncée, et le juge étant interprétés par le même acteur Abraham Sofaer. 


Entourés de comédiens proches : Roger Livesey, qui avait incarné l’un des personnages principaux dans Le  Colonel Blimp, Raymond Massey qui joue le sévère procureur Abraham Farlan, et vu précédemment dans Le 49ème Parallèle, et enfin le merveilleux et flamboyant guide céleste Marius Goring qui jouera par la suite dans Les Chaussons rouges, Powell et Pressburger pouvaient également compter sur le talent de leur chef décorateur Alfred Junge [3], responsable entre autres de la toile représentant l’univers et ses galaxies durant la scène d’ouverture.

Film préféré de Michael Powell, Une question de vie ou de mort mérite son statut de classique. Romance fantaisiste au charme vintage, sa ressortie dans les salles coïncide parfaitement avec les fêtes de fin d'année.

En attendant Le narcisse noir l'année suivante.




Crédits Photos : © 1946 Carlton Film Distributors Limited. Tous droits réservés. Sous licence de ITV Studios Global Entertainment Limited et distribué par Park Circus Limited.


A Matter of Life and Death (Une question de vie ou de mort) | 1946 | 104 min
Réalisation : Michael Powell & Emeric Pressburger
Scénario : Michael Powell & Emeric Pressburger
Avec : David Niven, Kim Hunter, Roger Livesey, Raymond Massey, Marius Goring, Bonar Colleano, Bob Roberts, Abraham Sofaer, Robert Coote
Musique : Allan Gray
Directeur de la photographie : Jack Cardiff
Montage : Reginald Mills
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[1] Cardiff reçut l'Oscar de la meilleure photographie pour son second film avec Powell et Pressburger : Black Narcissus.

[2] Les auteurs ayant l'intelligence de présenter leur « ciel » comme un espace universel, à savoir sans basse considération religieuse.

[3] Collaborateur sur une dizaine de leurs films (A Canterbury Tale, The Life and Death of Colonel Blimp, I Know Where I'm Going !) et aussi vainqueur d'un Oscar pour Black Narcissus

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