Cronico Ristretto : Le soldat Laforêt - Guy Cavagnac (1971)

Ofni passé inaperçu sur grand écran en 1974, Le soldat Laforêt de Guy Cavagnac sort pour la première fois en DVD le 7 septembre prochain. Restauré en Haute Définition à partir des négatifs originaux grâce au soutien de la cinémathèque de Toulouse, qui fut également à l'origine de la restauration de La Campagne de Cicéron produit par Guy Cavagnac en 1988, cet unique long métrage réalisé en 1970 par l'ancien assistant de Jean Renoir s'offre ainsi une nouvelle jeunesse. Dont acte.
 
Juin 1940. Le soldat Laforêt (Roger Van Hool) perd par mégarde son régiment au détour d'une route. Tentant de retrouver en vain ses camarades, le jeune homme se met à errer à travers la campagne Aveyronnaise. Son vagabondage l'amène dès lors à croiser toute une galerie de personnages singuliers dont la jolie Diane (Catherine Rouvel)...

Compagnon de route de Paul Vecchiali, dont il fut également l'assistant sur son premier long métrage Les ruses du diable, et de Liliane de Kermadec, avec qui il fonda la société de production Unité 3 [1], Guy Cavagnac tourna Le soldat Laforêt en septembre 1970. Portrait atypique d'un déserteur durant la Seconde Guerre mondiale, le métrage n'avait nulle vocation à décrire une réalité historique, et comment le pouvait-il avec des soldats stationnant en Aveyron alors que le front se situe au nord du pays en pleine Bataille de France, et un soldat Laforêt à la mèche bien trop rebelle allant à la rencontre d'habitants nullement ébranlés par les événements actuels. Seul point d'ancrage historique dans ce récit où le temps semble s'être arrêté, un couple perdu sur les routes du sud-ouest symbolisant l'exode. Long métrage volontairement en décalage avec l'Histoire, Le soldat Laforêt s'en éloigne en somme pour mieux embrasser l'air du temps et les utopies de son époque, celles de l'après 68 : des personnages libres, hors de la société, à l'image du trio amoureux interprété par Roger Van Hool, Catherine Rouvel et le grand acteur espagnol Francisco 'Paco' Rabal (Riccardo dans L'éclipse de Michelangelo Antonioni, ou le mutique tueur à gage Nilo dans Sorcerer de William Friedkin) ou du vagabond joué par Fernand Sardou [2].

 

Le soldat Laforêt séduit par son charme déphasé, de la beauté des paysages de l'Aveyron à la fantaisie qui anime les protagonistes de cette fable atemporelle, l'adjudant fou (Bernard Haller) ou le cordonnier pré-hippie (Henry Courseaux), sans oublier le passage quasi-onirique évoquant le Déjeuner sur l'herbe d'Édouard Manet. Entouré des fidèles de Paul Vecchiali, du compositeur Roland Vincent au chef opérateur Georges Strouvé, cet unique long métrage de Guy Cavagnac, s'il reste mineur, s'inscrit toutefois parfaitement comme un instantané de la « parenthèse enchantée » 70's.

A découvrir.




Le soldat Laforêt | 1971 | 97 min
Réalisation : Guy Cavagnac
Scénario : Guy Cavagnac & Claude Delmas
Avec : Roger Van Hool, Catherine Rouvel, Francisco Rabal, Fernand Sardou, Bernard Haller, Jacques Rispal
Musique : Roland Vincent
Directeur de la photographie : Georges Strouvé
Montage : Catherine Delmas
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[1] Paul Vecchiali put ainsi produire via cette société L'étrangleur, Femmes femmes encensé à l'époque par Pier Paolo Pasolini, ou Change pas de main, et Liliane de Kermadec son premier long métrage, Home Sweet Home.

[2] Catherine Rouvel et Fernand Sardou qui jouaient chacun un petit rôle dans le Déjeuner sur l'herbe (1959) de Jean Renoir et pour lequel Guy Cavagnac était assistant.
  

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