Live report : Ron Carter Golden Striker trio New Morning Paris - 19 juillet 2013

Rares sont les musiciens pouvant concilier humilité, CV prestigieux et gigantesque discographie. Ron Carter est de ceux là. Celui qui fut le sideman le plus demandé durant la deuxième moitié du 20ème siècle, intégrant nombres de formations de classe mondiale, dont le légendaire second quintette de l'ombrageux Miles Davis [1], n'est autre que le contrebassiste ayant le plus enregistré de disques dans l'histoire de la musique. Avec un millier d'albums (minimum) à son actif, l'homme outrepasse fort heureusement cette simple statistique. Doté d'une technique prodigieuse et d'une élégance naturelle, Ron Carter dépasse le statut premier et générique du musicien rythmique de second plan, tel que peut le laisser supposer son instrument. Véritable pilier mélodique que toute formation rêve et rêverait d'avoir, le contrebassiste reste toujours aussi actif du haut de ses 76 printemps, 2013 coïncidant avec la sortie de son album enregistré en public (à) San Sebastian avec son Golden Striker trio, et d'un featuring amical sur le Magnetic du trompettiste Terence Blanchard.

Avoir l'opportunité de rencontrer un tel musicien de légende se représentant finalement peu, le préposé docteur à la chronique ne s'est donc pas fait prier pour découvrir ce trio original : contrebasse, guitare et piano. De cette formation, on retiendra en préambule que celle-ci existe depuis une dizaine d'année depuis l'album studio éponyme The Golden Striker chez Blue Note en 2003, avec déjà Russell Malone à la six cordes et le regretté Mulgrew Miller disparu au mois de mai dernier.

 

Scindé en deux sets d'une heure, le concert fut de l'ordre du merveilleux. Leader à l'écoute de ses acolytes, la prestation de Carter confirma au besoin son statut de musicien exceptionnel et sa brillante longévité. A l'opposé de certains vieux jazzmen vivant sur leur supposée légende, le contrebassiste laissa un souvenir et une empreinte remarquable d'humanité et de bon humeur [2]. Principalement axé sur San Sebastian, la setlist offrit également à chacun des musiciens l'espace nécessaire pour s'exprimer librement. Or, la tâche pour le petit nouveau, Donald Vega, ne s'avérait pas des plus aisés. L'entente entre Carter et Malone pouvait laisser peu de place au timide Vega, le guitariste s'attirant immédiatement l'attention du spectateur, par exemple, lors de sa courte interprétation du classique soul When a Man Loves a Woman de Percy Sledge. Mais les doutes disparurent rapidement dès les premières notes jouées par Vega sur le standard de Hart et Hodgers, My Funny Valentine. Le pianiste apporta ainsi, tout au long du concert, un appui mélodique des plus précieux au trio. Jazz contemporain avec quelques incursions vers les musiques latines (les compositions Saudade de Ron Carter et Samba de Orpheu de Luiz Bonfá), ces deux sets furent la preuve, comme le disait non sans humour le contrebassiste, qu'avec d'excellents musiciens, on ne peut faire que de la bonne musique.

Un moment de grâce, d'émotion et d'humour.


Ron Carter Golden Striker trio
Ron Carter - Contrebasse
Russell Malone  - Guitare
Donald Vega  - Piano


 


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(1) De 1963 à 1968, de Seven Steps to Heaven à Filles de Kilimanjaro.

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