Maciste contre la reine des Amazones - Clifford Brown (1973)

Faut-il avoir des valeurs étriquées et un manque flagrant de recul pour considérer l'entière filmographie de l'espagnol Jesús Franco comme une foire aux mauvais films dont seul émergerait le culte Horrible docteur Orlof ? Peut-on raisonnablement penser que l'homme n'avait pas conscience des avantages, mais aussi des limites que pouvait lui offrir les productions Bis ? Car la question n'est pas de remettre en cause l'existence de ses films ratés, Franco en a réalisé de nombreux, il le savait. On notifiera simplement aux cuistres rigolards que la plupart de ces mauvais films sympathiques sont avant tout, sinon des commandes, tout du moins des films impersonnels où l'univers du réalisateur de La comtesse noire n'apparaît pas ou très peu. A l'image de ce Maciste contre la reine des Amazones signé par son pseudo Clifford Brown et produit par Robert de Nesle ? Pas exactement, en partie du moins, mais n'allons pas trop vite.

Dans une auberge, à l'époque de la Renaissance, un dénommé Pindar (Robert Woods) narre à son ami Maciste (Wal Davis) son dernier voyage qui l'a vu traverser l'Atlantique, et pénétrer le nouveau continent pour y rencontrer les mythiques Amazones. Capturé et devenu l'objet sexuel de ses sauvageonnes aux seins nus et à la croupe légère, Pindar était voué à connaitre un funeste destin une fois effectuée sa mission reproductrice. Sauvé in-extremis, devant son salut et sa libération à l'amour d'une jeune Amazone prénommée Marcia, il put finalement quitter les lieux sain et sauf. De ce récit, Pindar convainc son compagnon à la force surhumaine de l'accompagner de nouveau chez ces dangereuses Amazones afin de trouver leur trésor. Bien que plus intéressé par l'aventure que par les joyaux promis, Maciste accepte le voyage. Mais une fois sur place, Maciste, Pindar et Marcia se font rapidement capturer. La Reine des Amazones leur a tendu une embuscade (Alice Arno). Malheureusement pour Yuka (Lina Romay), protégée de la reine et prêtresse de cette petite communauté saphique, sa maîtresse royale s'éprend du très viril Maciste...

 
 Marcia semble avoir de solides arguments pour convaincre Maciste

Connu également dans notre contrée sous le nom Les amazones de la luxure, ces premiers exploits érotiques de Maciste [1] ne brillent ni par leur virtuosité, ni par une production de qualité. Filmé comme à l'accoutumée chez Franco dans un jardin tropical, la jungle amazonienne ne fait guère illusion, tout comme les décors utilisés. Quant aux dites amazones, celles-ci ressemblent à la caricature sexy et bon marché représentée dans les bandes-dessinées pour adultes des années 70. Mais en attendait-on plus ? Pas vraiment. Au contraire. L'intérêt ou la justification d'un tel métrage cheap se mesure bien au-delà de ses divers détails chez Franco.

 
La reine des Amazones (Alice Arno) et sa favorite Yuka (Lina Romay)

La présence du bellâtre Wal Davis explique à elle seule la mise en scène décomplexée du madrilène. Maciste, contrairement à son cousin éloigné Hercule, n'a pas la prétention d'avoir une tête bien faite. Or Davis et son jeu limité incarne, volontairement ou non, la légèreté et les passages à vide de son personnage. Misant sur l'exhibitionnisme des demoiselles, Lina Romay en tête, Franco applique scrupuleusement le cahier des charges d'une sexploitation. Rien de plus, rien de moins. Véritable fantaisie softcore tournée et jouée à l'arrache, nul ne peut prétendre avoir été dupé, du spectateur aux interprètes, à l'instar d'Alice Arno s'amusant de ces situations grotesques (par exemple lorsqu'elle bat la mesure avec un bâton pour que ses Amazones gardent le rythme quand elle chevauche leur étalon blond).

  
Un, deux... un, deux... un, deux..

Sans prétention, Maciste contre la reine des Amazones de Jesús Franco s'inscrit dans sa période Comptoir Français du Film, où l'on retrouve plusieurs acteurs récurrents dont le duo Alice Arno [2] et Robert Woods (La comtesse perverse, Plaisir à trois, Le miroir obscène). Vrai-faux mauvais film sympathique, entre la pochade polissonne et le film d'aventure mou foutraque, ce Maciste benêt et libidineux connaîtra la même année une suite, ou plutôt une relecture (dans la grande tradition francienne), avec exactement les mêmes protagonistes devant et derrière la caméra dans Les exploits érotiques de Maciste dans l'Atlantide.



Maciste contre la reine des Amazones (Karzan contro le donne dal seno nudo - The Lustful Amazons) | 1973 | 70 min
Réalisation : Jesús Franco (Clifford Brown)
Production : Robert de Nesle
Scénario : Jesús Franco Manera
Avec : Wal Davis, Alice Arno, Robert Woods, Montserrat Prous, Lina Romay, Kali Hansa, Chantal Broquet
Musique : Robert Viger
Directeur de la photographie : Gérard Brisseau
Montage son : Gérard Kikoïne
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[1] Il semblerait que Maciste ne soit usité que pour la version française, les autres ayant droit à un Karzan.

[2] On notera au passage la présence de Chantal Broquet, sœur d'Alice Arno.

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