Mondo Cane - Mike Patton (2010)

Sorti le 4 mai dernier sous le titre Mondo Cane, le nouvel album du prolifique Mike Patton est tout sauf une véritable surprise pour l'habitué. Album prévu depuis deux ans, longtemps reporté, ce nouveau disque compile les performances live du frontman de Faith No More, lors de sa première tournée transalpine accompagné de soixante-cinq musiciens, où il reprenait à son compte plusieurs chansons du répertoire de la variété italienne des années 50-60. Une non surprise tant le chanteur, par le passé, a toujours su jongler entre les styles au sein de Faith No More, mais aussi et surtout au sein du groupe qu'il forma avec Trey Spruance et Trevor Dunn durant ses années lycée, Mr Bungle. Doté d'un des plus beaux organes que le rock ait connu, aussi à l'aise en costard dans le rôle du crooner que dans celui du brailleur hurleur amateur de projets barrés, pouvait-il donc étonner son auditoire en reprenant de la pop italienne surannée [1], qui plus est en connaissant son goût pour la langue de Dante et ses accointances avec le grand Morricone [2?

Par ordre de sortie, après ses deux bandes originales, celle du court-métrage A Perfect Place (2008) et celle plus dispensable de Crank: High Voltage (2009), Mike Patton remet le couvert et propose donc sa nouvelle production annuelle... en attendant peut-être l'année prochaine le premier disque de son nouveau projet avec le producteur Dan The Automator, Crudo. L'amateur éclairé et objectif admettra que hormis la reformation de Faith No More sur scène l'année dernière, l'actualité autour du chanteur semblait plutôt morne. Si l'artiste protéiforme n'avait pas totalement perdu de son éclat, difficile de prétendre toutefois le contraire. Les dernières productions pattoniennes n'avaient aucune mesure avec celles de la décennie précédente ou de la première moitié des années 2000. Restait évidemment ses collaborations zorniennes ou celle avec le groupe italien Zu par exemple, mais rien qui n'empêchait de ronger son frein [3].

Issu des performances orchestrales de Patton, le disque avait sur le papier de quoi rivaliser avec ce qui se fait de pire en matière de prestation ampoulée et grotesque, si on en croit le regain de popularité pour le digeste mélange des genres pop, orchestre symphonique et chorale. Sauf que Mike Patton n'est pas le premier chanteur de variété venu, bombant le torse et les gonades, braillant du Caruso pour la ménagère en mal de sensations gluantes. Enfin pas encore.

L'auditeur avait déjà pu se faire idée du résultat avec le concert retransmis au Paradiso d'Amsterdam du 12 juin 2008. Or autant des réserves à l'époque étaient de mises du fait en grande partie de la longueur du set, autant sur un disque d'une trentaine de minutes, le leader de Fantômas, s'il ne frise pas le tour de force, pourrait faire taire les sceptiques. Connaissant le passif de cet italophile, on pouvait craindre (?) que Mondo Cane rime avec parodie. Sans véritablement s'éloigner de l'anecdotique, force est d'admettre que la conviction de Patton ne fait jamais défaut, en dépit de chansons originales lorgnant un peu, beaucoup, passionnément vers le kitsch. Cependant l'homme (parlant couramment italien) bluffe par sa diction, étonne et ravit par ses relectures, le style et la versatilité du chanteur allant de pair avec celle des chansons : du hargneux Urlo Negroaux ballades Quello Che Conta ou Scalinatella, en passant par le swing 20 Km Al Giorno.

L'album pop (suranné) de Mike Patton (qu'on attendait enfin).

La chronique de Nathan et de Systool.



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[1] On aura bien compris que le thème du premier paragraphe est celui de la non surprise...

[2] Patton ayant dans un premier temps produit une excellente compilation regroupant des compositions de Morricone nommée Crime and Dissonance sortie sur son label Ipecac Recordings, et dans un second temps repris sur le dit album le morceau Deep Down issu de la bande originale du classique de Mario Bava, Danger Diabolik (1968).

[3] L'incartade pop mitigé Peeping Tom pouvait laisser craindre le pire quant au résultat de ce Mondo Cane.

25 commentaires:

  1. "Mike Patton, doté d'un des plus beaux organes que le rock ait connu" : waouh, c'est une vidéo porno dans ta collection? ;-)

    Je me réjouis d'écouter (ENFIN) cet album...

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  2. @ Syst: je savais bien que cette petite phrase innocente n'allait pas passer inaperçue... en même temps, la perche était tellement énorme, attendais-je une réaction? hi hi ^^

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  3. J'ai adoré cet album. Je l'adore d'ailleurs encore. C'est presque ce que je préfère de Patton, si on omet Naked City, c'est dire...
    (Ouais je suis plus pop que Faith No More).
    J'en avais parlé il y a quelques temps d'ailleurs :
    http://brainfeedersandmindfuckers.blogspot.com/2010/04/la-dolce-vita.html

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  4. Et tu remets ça avec ton histoire de perche ;-)

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  5. @ Nathan: oui je sais, je l'avais lu, mais j'attendais la sortie officielle pour écrire une chro. Mais tu fais bien de rappeler au bon souvenir de ta chro, j'avais omis d'ajouter un lien vers ton post, je répare cette erreur de suite ;-)

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  6. Ouais, voilà, c'était du pur spam, j'avoue.

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  7. je suis moyennement emballé. Il y a quand même des morceaux que j'apprécie beaucoup, notamment "che notte", mais dans l'ensemble je trouve ça quand même kitsch et poussif (je sais que c'est volontaire mais les ballades de Faith No More l'étaient aussi mais ça passait nickel). Pas déplaisant non plus, mais ce n'est pas le disque pop que j'attendais de l'ami Patton (aucun de ces morceaux n'arrivent à la cheville des chansons pop qui figurent sur "california")

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  8. Euh docteur Furter, que faut-il subodorer comme sensations quand vous écrivez "en mal de sensations gluantes" ? Bon je sors...

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  9. @ Nyko: oui forcément, tu sors l'artillerie lourde, le California de Mister Bungle... Je l'écoute depuis longtemps, et je ne m'en lasse pas et n'a surtout aucune mesure avec le tristoune Peeping Tom. Après, faut prendre cet album pour ce qu'il est, un bel hommage sincère, une belle relecture mais effectivement ça ne va pas plus loin. Mais c'est déjà pas mal.

    @ Dame Eolia: vous passerez au cabinet du docteur des fessées vous attendent pour la peine ^^

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  10. Un peu comme Nyko. La 1ère écoute m'empêche de chosir entre attraction / répulsion ... Une chose est sure : c'est bien kitsch !

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  11. @ Thierry: mouais à kitsch je lui préfère l'étiquette surannée :-D
    Patton évite toute de même l'écueil potache qui justement aurait été synonyme selon moi avec durée de vie limitée: "Mike Patton dans ses meilleures blagues, aujourd'hui la variété italienne"... en attendant "le meilleur de Bollywood"... cela dit, au sein de Mr Bungle, il a bien repris en concert Ei Raat Tomar Aamar de Hemanta Mukherjee :-P

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  12. Super article.

    Non, c'est pas vrai.

    Je confesse n'avoir pas été au bout. Je suis navré, je sais que c'est une blague récurrente... mais en fait c'est moyen drôle, un gros migraineux comme moi souffre vraiment énormément quand il veut te lire :-(

    Je vais copier l'article dans un doc google et le lire tranquillement ce soir ;-)

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  13. @ Thomas: Je vois que nous ne sommes pas constitués de la même manière, moi ce sont les blog sur fond blanc qui m'arrache les yeux, et c'est l'une des raisons qui m'a poussée à mettre un fond gris foncé.
    Alors effectivement, même en réglant la luminosité et le contraste de ton écran, la lecture te reste toujours autant difficile, j'en suis vraiment désolé :(

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  14. @ Thomas: finalement t'as gagné, j'ai décidé de tout changer :-D

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  15. Bon, alors première impression globale : c'est une évidence que Patton ait fait un album pareil : cette musique lui va comme un gant. On y retrouve ce ton facétieux, à la fois lyrique et burlesque. Connaissant les influences de Patton, et notamment celle de Morricone, il n'était pas étonnant qu'il nous ponde un tel album de reprises un jour.

    Soit.

    Maintenant, du point de vue du résultat, je dirais que c'est honnête. Pas l'album de l'année, pas un bouze non plus, mais correct. Après A Perfect Place, ça reste une bonne suite au niveau qualitatif (j'omets le pourri Crank : 2)

    SysT

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  16. Oh ! T'as changé le fond ? C'est tellement... sympa !

    Du coup je n'ose pas trop dire que je trouve cet album à chier et que Mike Patton, bon an mal an, me semble de plus en plus paresseux et surestimé :-D

    Sinon pour te répondre : moi aussi, les fond blanc me font mal aux yeux (d'où le fond du Golb)... mais en fait mon problème, c'était moins le fond que la couleur de caractère. J'étais obligé de froncer les sourcils comme un malheureux pour lire deux phrases. Je crois aussi que mes migraines s'accentuent avec le temps (jusqu'alors te lire ne m'était pas assez douloureux pour que j'en parle). Avec le fond blanc, c'est à peu près supportable sur la durée d'un article... le plus dur, c'est de repasser à une autre fenêtre avec un fond plus coloré.

    Ceci était notre parenthèse je raconte ma vie :-)

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  17. @Syst: ah mais nous sommes sur la même longueur d'onde, car finalement ma conclusion "l'album pop de Patton" résume assez bien la situation. Un bel album récréatif, ni plus ni moins... et c'est déjà pas mal en tenant compte du passif du monsieur.

    @Thom: je le crois pas, je reste urbain pour pas chier sur les Deftones TOUTES époques confondues, je ronge mon frein, et monsieur me chie sur mes pompes... très bien, je le note :-D

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  18. Ce Patton me fait plutôt rire, j'ai du mal à l'écouter comme un véritable album mais cela reste bien plaisant.

    Bon sinon j'en dis comme Thom, il était vraiment temps pour le changement de fond. On se sent d'un coup encore mieux ici :)

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  19. @Benjamin: Dites ce que vous voulez, mais il me manque moi mon ancien fond anthracite!!! :-D

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  20. Moi aussi, je l'aimais bien l'anthracite :-(

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  21. @ Thierry: merci de remuer le couteau dans la plaie ^^

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  22. Non mais je ne te chie pas sur les pompes :-)

    D'ailleurs en fait je pense comme Benjamin. La première fois que j'ai entendu cet album, j'ai éclaté de rire. Les deux trois fois suivantes j'ai trouvé ça assez cool. Le problème c'est que pour des raisons indépendantes de ma volonté et totalement illégales, j'ai cet album depuis plusieurs mois, et ai eu tout loisir de le voir se dégonfler au fil du temps...

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  23. @ Thomas: 5 semaines, et la baudruche tient encore la distance chez moi :-D

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  24. Bon ben on attend de voir ça :
    http://www.noisemag.net/?p=5223

    SysT

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  25. @ Syst: au moins il ne chôme pas :-D

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