Ninth Moon Black - Ninth Moon Black (2008)

Pour ceux qui l'ignoraient encore (les bienheureux?), le préfixe post pour définir une musique [1] peut très bien s'accommoder à toutes les sauces... même les plus épicées. Et en matière de rock' n' roll [2], le punk fut sans doute le premier à avoir eut droit à ce sobriquet gentiment foutraque. Le post-punk ayant même la délicate attention de pousser du pied son ainé avant même que ce dernier n'eut le temps de pousser son dernier soupir [3]. Le début des hostilités ayant été sifflés, vinrent à la pelle comme on ramasse les feuilles mortes, le post-rock, le post-hardcore et certains poussant même le vice à créer l'étiquette post-grunge... Jamais avare à imaginer une nouvelle branche à son arbre déjà bien garni, le metal, sous la houlette des groupes précurseurs tels que les Melvins, Godflesh et surtout Neurosis, vit ainsi l'émergence courant 90's du post-metal, genre métallique faisant ainsi le lien entre le post-rock et le metal... tout en n'oubliant pas d'incorporer des influences aussi diverses que l'ambient, le drone, l'industriel ou le hardcore pour les plus gourmands/aventureux, avec comme figures tutélaires les précédemment cités Neurosis, Isis ou Pelican. Voici pour les présentations d'usage.

Formés en 2003 à Fresno en Californie avant de rapatrier un peu plus au nord à Eugene dans l'Oregon, les Ninth Moon Black proposent une relecture sinon originale des groupes cités ci-dessus tout du moins personnelle. Comme pour Pelican, le groupe est avant tout instrumental, composé de deux guitaristes, d’un bassiste, d’un claviériste et… d’une batteuse. Si le genre du musicien derrière les futs reste anecdotique, quand bien même une demoiselle à ce poste reste rare pour ce genre de musique, la place du claviériste et en particulier celle des synthétiseurs est quant à elle prédominante. L’utilisation des synthés dans un groupe métallique se rapprochant plus d’un Rick Wackeman (le groupe Yes) que d’un Roddy Bottum (Faith No More) [4], on pouvait craindre la prédominance de ces derniers, sauf que Ninth Moon Black n’étant pas un groupe de métal progressif, les sueurs froides de la vaine grandiloquence n’ont pas lieu d’être.

Comme ses pairs, la musique du quintette se distingue par une ambiance où le mot lumineux n’appartient que très rarement à son vocabulaire. Ce premier album éponyme d’une quarantaine de minutes fut ainsi conçu comme la bande originale et imaginaire d’un thriller d’anticipation particulièrement sombre. Pour se faire, la musique de Ninth Moon Black bien qu’instrumentale se voit accompagner de divers bruitages sonores réalistes et de samples aux monologues inquiétants. En schématisant, on pourra faire tendre ce premier essai comme une version accessible et musicale du fameux Delirium Cordia de Fantômas qui divisa tant les amateurs du quartette de Mike Patton. Ninth Moon Black propose ainsi une musique où les ambiances ont un rôle primordiale, soutenu par des guitares tranchantes et une batterie, qui du fait ou non du sexe de la protagoniste, rappelle plus une version punk de celle du Mezzanine de Massive Attack que le rouleau compresseur apocalyptique prénommé Dave Lombardo (Slayer/Fantômas). Parmi les quelques réserves, on pointera non pas l’utilisation mais le son des synthétiseurs, un son plus vintage aurait sans doute apporté un peu plus de richesse [5]. Autres points discordants, l’album se voulant la B.O. d’un film imaginaire, il n’est pas rare d’entendre une ou deux fois des parties déjà réutilisées précédemment, mais au contraire ce procédé permet aussi une meilleure cohésion à cet ensemble sonore, dès lors...

Ninth Moon Black, un premier album éponyme à la croisée d’un Tool ou d’un Pelican sans grande surprise, mais qui sait rester efficace et accrocheur, et qui va à l’encontre des griefs qu’on reproche souvent et à juste titre à certaines formations de post-rock/metal.


En écoute sur Bandcamp.


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[1] Un des passe-temps favoris de l'amateur de musique... et en particulier du metalhead moyen, il serait dommage de confondre un groupe de funeral war metal avec un groupe de symphonic black metal, n'est-il pas?

[2] Vous faisant grâce du post-bop en matière de jazz ou du méconnu... post-disco.

[3] Fin 1977 ayant vu se poindre le premier album de Wire, Pink Flag, qu'on peut considérer comme déjà l'un des actes fondateurs du post-punk.

[4] Certes, avant de sortir les objets contondants, les deux groupes cités ne sont pas des formations de heavy metal mais l’usage des claviers chez ces deux musiciens résument selon moi les deux positions antagonistes qu’on retrouve dans le metal quant à l’utilisation des dits synthés.

[5] Réserve à pondérer étant donné les moyens financiers du groupe… et puis il fallait bien que le préposé trouve quelque chose à redire aux synthétiseurs…

3 commentaires:

  1. Tiens, tiens...

    Pourquoi pas? Ca me dit bien, au vu des références que tu cites et malgré tes réserves!

    Post-SysT

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  2. ce sont des réserves très légères! Ce premier album est très agréable et pas mal foutu, en espérant qu'ils puissent confirmé par la suite :-)

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  3. Salut,
    C'est pas une obligation, mais si tu veux, il faudrait que tu t'occupes de ça : http://duclock.blogspot.com/2009/11/7-morceaux-qui-tournent.html

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